La reconversion, parent pauvre des politiques d…
Dans cet article publié le 28 juin 2016 sur le site de Challenges, Arnaud Aymé, Associé chez Sia Partners, revient sur le lancement à venir par la SNCF de l'offre TGV POP et de sa stratégie de séduction des jeunes, symbolisée et portée par ce projet.
Des tarifs un peu plus chers, mais une offre élargie à plus de trains et accessible toute l’année: fort de son succès de l’été 2015, la SNCF relance son opération TGV POP. Ces places de trains « à la demande » sont à réserver en votant sur le site internet dédié. Les premiers départs sont prévus le 1er juillet. Et plus il y a de vote, plus il y a de chance de partir. L’opérateur de transport public invite donc les candidats à partager sur les réseaux sociaux pour augmenter ses chances. Cette année, l'offre a été peaufinée: elle s’étend désormais à la plupart des TGV circulant hors des périodes de pointe. Petite précision, et non des moindres, il faut aimer les départs entre 4h et 6h du matin!
Les places POP à prix réduits (entre 10 et 50 euros) sont proposées aux votes 15 jours avant le départ, puis mises en vente à J-3. En cas de feu vert, les voyageurs sont prévenus par courriel et reçoivent un code leur permettant de réserver leur place. Au total, une centaine de destinations sont concernées (contre 30 l’été dernier) avec 500.000 billets disponibles du 1er juillet au 30 septembre. C'est 5 fois plus que l’an dernier. Autre nouveauté: les TGV Pop fonctionneront désormais toute l’année.
L’objectif est toujours le même: reconquérir une clientèle, notamment les jeunes, qui s’est déroutée vers le co-voiturage ou les autocars (qu’exploitent également la SNCF avec les Ouibus) du fait de leurs tarifs plus attractifs. Mais aussi cibler des voyageurs qui n’ont jamais pris le train. "Nos enquêtes ont montré que la moitié des clients n’auraient pas pris le train sans l’offre POP", observait Rachel Picard, la directrice générale de Voyage SNCF, lors d’une conférence de presse en janvier. Selon elle, en 2014, un million de voyageurs ont délaissé le train pour le covoiturage.
De fait, l’opérateur public est bien obligé de s’adapter face à « l’ubérisation » de la mobilité, qui pousse une partie de ses clients à vouloir voyager tout le temps et partout à un prix fixé à l’avance. "La moitié des 18-24 ans achètent leurs billets une semaine avant le départ, et nombre d'entre eux se décident carrément la veille ou le jour même", constatait encore Rachel Picard, reconnaissant que le système classique de tarification de la SNCF pour cette cible devenait moins compétitif.
Mais en optant pour une politique de baisse de prix à la dernière minute, la SNCF risque de remettre en cause sa politique de yield-management. Ce mécanisme de vente qui consiste à habituer ses clients à réserver le plus tôt possible pour obtenir des prix bas.
"La SNCF ne remet pas en cause son modèle, estime Arnaud Aymé, expert du secteur chez Sia Partners, mais elle complète plutôt son offre afin de capter une clientèle qui sinon ne prendrait pas le train. Il y a en effet suffisamment d’incertitude (quant aux destinations et horaires éligibles puis à la confirmation ou non de l’offre) pour éviter les effets d’aubaine ou le risque de cannibalisation avec son offre TGV classique », poursuit-il.
La SNCF conserve notamment la prime à l’anticipation avec les billets Prem’s par exemple, qui reste moins chers que les billets POP.
Cette politique de promotion ciblée vise surtout à doper le taux de remplissage des TGV qui s’est dégradé ces dernières années. Supérieur à 75% en moyenne avant la crise de 2008, il est tombé à 65% en 2015. Aux heures creuses, les TGV circulent parfois à moitié vide, alors qu'ils doivent acquitter le même niveau de péages et dégradent donc les comptes de la branche. Pour les remplir en 2016, la SNCF a multiplié par deux son offre de petits prix (via également les TGV low cost Ouigo). Elle tirera le bilan de cette politique à l’automne.