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Développement du marketing de services : le transport de voyageurs

Les transformations dans le secteur du transport public rendent nécessaire une amélioration du service client. Si l'industrie du voyage et le transport aérien ont déjà montré le chemin, la tendance est nouvelle dans le transport ferroviaire et elle n'est qu'émergente dans le transport public.

Les transformations dans le secteur du transport public rendent nécessaire une amélioration du service client. Si l'industrie du voyage et le transport aérien ont déjà montré le chemin, la tendance est nouvelle dans le transport ferroviaire et elle n'est qu'émergente dans le transport public. De multiples enquêtes mettent pourtant en lumière une satisfaction mitigée des clients-usagers sur le service qui leur est rendu et sur la qualité de leur relation avec l'opérateur.

Proposer pléthore de services est intéressant, encore faut-il qu'ils soient en cohérence avec l'offre de l'entreprise et qu'ils apportent une réelle valeur ajoutée au client. Des exemples dans le transport ferroviaire montrent néanmoins la récente prise de conscience des enjeux que représentent les services aux voyageurs. Les services proposés enrichissent réellement la prestation de base et sont mieux mis en valeur auprès des clients.

L'article présente une méthode systémique pour décliner l'ambition de service sur chaque étape du parcours client et pour formaliser les moyens mis en oeuvre par l'entreprise pour y parvenir : la constitution d'un « référentiel de services ». Il détaille également les bonnes pratiques à suivre et les embûches à éviter pour déployer ce référentiel chez les employés en contact avec la clientèle.

1. Une approche des services centrée sur l'utilisateur

Proposer pléthore de services n'est pourtant pas la panacée pour stimuler la satisfaction du client et obtenir sa préférence. Il est avant tout nécessaire de lui proposer des services cohérents avec l'univers de la marque, qui soient susceptibles de l'intéresser et user des moyens nécessaires pour qu'il ait conscience que ces services existent.

L'exemple de TGV est intéressant. Historiquement, l'image du TGV s'est construite sur ses performances techniques, sa modernité, sa vitesse. Avec l'ouverture à la concurrence, la SNCF a voulu faire de TGV une marque de service, qui porte une expérience de voyage. Toutes les critiques que les clients peuvent formuler ont été collectées et analysées via des baromètres (défaut de ponctualité, manque d'information sur les incidents, attentes au guichet,...). Elles servent aujourd'hui de fondamentaux aux promesses de service, telles que :

- L'information à bord en situation perturbée ;

- La propreté à bord (la SNCF a dû faire de la propreté des toilettes TGV une priorité !) ;

- La prise en charge des clients en cas d'impossibilité à réaliser le trajet vendu ;

- L'information du temps d'attente au guichet par le vendeur ;

- Le conseil du vendeur sur les tarifs et services ;

- Un service client réactif ;

- La qualité de l'accueil sur le quai et à bord ;

- Etc.

Cet exemple montre qu'une approche structurée du portefeuille de services, porteuse de rigueur et de sens, permet de traquer et d'apporter une réponse positive aux insatisfactions du client. Le simple fait de formaliser chacun des services en décrivant avec précision les éléments relatifs à l'offre délivrée, le niveau d'exigence à atteindre et l'organisation idoine à mettre en place, permet de constituer un référentiel. Sur cette base, il est ensuite aisé de répertorier les services, ainsi que d'identifier les points d'amélioration et les manques.

2. Structurer une offre de service claire et lisible par tous

La cohérence globale des services du référentiel est assurée en ciblant un segment de population prioritaire. En effet, chercher à satisfaire tous les clients, c'est s'exposer à n'en satisfaire aucun. Chez easyJet par exemple, l'offre de service cible une clientèle à bas revenus en proposant notamment pour un niveau de service minimal des vols à prix cassés aux premières heures de la matinée. Le personnel de la compagnie en tient compte, bien qu'il soit conduit à accueillir une clientèle régulière à toute heure, prête à dépenser davantage pour améliorer le confort du vol. Ainsi, le client easyJet achète le service principal de transport d'une origine à une destination, mais il peut également s'offrir le service périphérique d'une canette de soda en cours de vol. De la même manière, le référentiel de services d'une entreprise est organisé selon une segmentation qui donne du sens à l'offre de services[2].

Cette segmentation permet de structurer les prestations proposées, ainsi que de réévaluer le niveau facultatif et gratuit de certains services. Si dans un TGV, le service périphérique des toilettes était supprimé ou devenait payant, la clientèle n'apprécierait plus autant le service de base...

La définition du niveau de service à délivrer est également extrêmement importante. Il s'agit de formaliser la promesse par laquelle l'entreprise s'engage à satisfaire les besoins de son segment prioritaire. Elle peut jouer sur la dimension :

- temporelle, tel la promesse des fast food ;

- prix, tel E.Leclerc communiquant sur ses prix bas ;

- qualitative, tel le voeu d'Air France « Faire du ciel le plus bel endroit de la terre » ;

- de l'achalandage, c'est-à-dire portant sur le volume de références disponibles (BHV « Tout pour trouver son bonheur »).

Enfin le référentiel de services doit comprendre la description de toutes les étapes au cours desquelles le client entre en relation avec l'entreprise.

Ce « parcours client » est structuré chronologiquement en fonction des différentes actions et besoins exprimés par le client, par exemple pour une prestation de transport : lors de la réservation, du départ, du trajet, de l'arrivée, de la réclamation,....

Une fois identifié l'ensemble des parcours client possibles, il est aisé de vérifier si les services du référentiel répondent effectivement au besoin du client, au bon endroit, au bon moment et avec une bonne coordination. Le parcours client permet également de s'interroger sur les limites des responsabilités de l'entreprise : où doit commencer la prise en charge du voyageur par un gestionnaire d'aéroport ? Lorsqu'il franchit le seuil de l'aérogare ou lorsqu'il cherche à l'atteindre (facilité d'accès, multi-modalité) ?

3. Valoriser le personnel qui porte l'offre de service auprès du client

S'appuyer sur le référentiel de services permet de décliner la promesse de l'entreprise envers ses clients en procédures concrètes et permet de donner du sens à l'offre de services. L'ensemble du système doit être porté par la Direction auprès du management de proximité. Il revient ensuite au manageur de démultiplier les attentes de sa hiérarchie à ses équipes opérationnelles en donnant du sens à leurs actions.

En effet, ce sont en particulier les agents en contact avec le client qui ont le plus besoin de sens pour être performants dans leur rôle. La perception du client sur la société et ses services est fortement influencée par le comportement des employés qui les lui dispensent. Quel effet dévastateur pour un transporteur que la réponse dilettante « écrivez à la Direction » formulé par un vendeur démotivé au client réclamant le remboursement d'un billet pour un trajet pas ou mal effectué...

Le collaborateur en contact avec la clientèle est donc une ressource clef dans la bonne diffusion de l'offre de service. Pour s'assurer de son adhésion, il faut qu'il comprenne l'importance des missions qui lui sont confiées, qu'il se sente valorisé par la charge qui lui incombe. Revaloriser des métiers parfois répétitifs et stressants contribue à l'amélioration des attitudes du personnel, rompant ainsi le cercle vicieux :

Il est essentiel de redonner le sens, le goût du métier à des collaborateurs souvent perdus, voire démobilisés et donc infidèles.

Cela dit, la codification de standards et de procédures n'implique pas un strict respect : il doit être possible de s'en écarter, de manière contrôlée et positive, en laissant une fenêtre de liberté au collaborateur. En effet, davantage d'autonomie et de place laissée à l'initiative lui confère davantage de responsabilités et de pouvoir sur son travail, le mettant ainsi en situation de générer la surprise auprès du client. Par exemple, après observation attentive des clients, l'agent en gare pourrait proposer son aide au voyageur chargé, en sueur, ayant deux enfants à ses côtés et qui semble perdu...

La surprise suscitée transforme une situation désagréable en une expérience positive et chargée d'émotion, ce qui rejaillit inévitablement sur l'image de l'entreprise.

Le référentiel de services est un outil apportant davantage de rigueur et de sens à la manière dont les services sont délivrés au client. La rigueur définit à la fois le cadre, la trame générique des services, mais elle doit surtout servir de repère au management ainsi qu'à ses collaborateurs. Le sens est lui porteur d'appropriation et de performance. Redonner du sens au service et de la valeur au personnel en contact avec la clientèle, c'est valoriser l'ensemble de la chaîne du référentiel de services.

 


[1] Le sondage BVA commandé par l'Union des Transports Publics pour l'édition 2009 de son Observatoire de la Mobilité montre une attente des clients non seulement sur l'offre proprement dite (fréquence, capacité, ponctualité) mais aussi sur les services (information voyageurs, confort, sécurité). Une étude du Human Consulting Group en 2009 place le secteur du tourisme bien devant celui du transport en matière d'accueil client. Enfin des enquêtes clients réalisées par les transporteurs montrent régulièrement la nécessité d'une relation plus proche, aimable et attentionnée avec les clients, tous canaux confondus.

 

[2] B.Meyronin et C.Ditandy(2007) Du management au marketing des services, Dunod