La reconversion, parent pauvre des politiques d…
Il y a plus de trois ans, le marché de la téléphonie mobile française a connu une révolution : l'arrivée d'opérateurs virtuels achetant en gros des minutes d'appel auprès des opérateurs de réseau
Il y a plus de trois ans, le marché de la téléphonie mobile française a connu une révolution : l'arrivée d'opérateurs virtuels achetant en gros des minutes d'appel auprès des opérateurs de réseau. Même si ils ont eu le mérite d'accentuer la concurrence, les MVNO (Mobile Virtual Network Operator) français rencontrent certaines difficultés qui les empêchent de dépasser plus de 5% de parts de marché. Bien que leur évolution soit constante depuis 2005, il semble difficile pour les opérateurs virtuels de se positionner sur ce marché largement contrôlé par les trois opérateurs leaders que sont Orange, SFR et Bouygues Telecom.
Comme le démontre le cas de NRJ Mobile, les résultats ne sont pas au rendez-vous. En effet, après 3 ans d'activités dans la téléphonie mobile, NRJ Mobile a du se résigner au mois de mai de cette année à abandonner son activité au Crédit Mutuel-CIC en lui cédant 40% de ses parts, groupe qui participait déjà dans le capital à concurrence de 50%.
Le MVNO français ciblait un public jeune, segment du marché le moins générateur de revenus car principal consommateur des cartes prépayées. Cependant, pour la marque NRJ, il semblait logique de devoir s'adresser à ce public étant donné leur image jeune. Pourtant face aux 35 millions d'euros de pertes de NRJ Mobile en 2007, le MVNO n'a pas eu d'autre choix que de se soumettre au mécontentement de ses investisseurs.
Cependant, la situation n'est pas noire pour autant dans le reste de l'Europe. En effet, la moyenne du taux de pénétration sur le continent européen s'élève à plus de 10%.
Ceci s'explique entre autre par une entrée sur les marchés locaux bien plus précoce que celle des opérateurs virtuels français, laissant l'opportunité aux MVNO d'acquérir des clients sur un marché mobile très jeune.
Un des premiers grands succès étrangers est celui de Virgin Mobile au Royaume-Uni en 1999. En cause, un petit opérateur de réseau, T-Mobile, évoluant sur un marché très compétitif, qui avait pour but d'optimiser l'usage de son réseau en devenant l'hôte de Virgin Mobile afin d'amortir ses coûts fixes.
Base, opérateur de réseau belge, a également suivi l'exemple de T-Mobile en étant le premier opérateur à proposer ses services de réseau à plusieurs MVNO, et ce, bien avant Proximus, opérateur historique et leader du marché belge.
Cependant, ce qui semble encourageant, est le faible taux de pénétration du mobile en France. Il ne représente que 83% alors que ses voisins européens sont à plus de 100%. Les MVNO peuvent donc envisager la conquête de nouveaux adeptes du mobile et ce, par exemple en adressant des cibles de niche de type ethniques (interview de Bernard Noël de Burlin, directeur du MVNO belge « Happy Many »).
Les opérateurs virtuels devraient également pouvoir trouver leur place sur le marché en imaginant des solutions de différenciation en termes de marketing et d'offres de services innovantes. Cependant, l'innovation technique reste un frein majeur au développement des MVNO dû à leur dépendance technique aux opérateurs historiques qui n'ont aucun intérêt à ce que la concurrence innove.
En plus de ce manque de maîtrise du réseau, les MVNO français doivent faire face à d'autres problématiques pointées par l'ARCEP (Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes) et le Conseil de la concurrence telles que:
- L'incapacité de faire jouer la concurrence en terme d'achat de minutes puisqu'ils sont liés à leur opérateur de réseau par un contrat d'exclusivité.
- L'apparition de clauses par lesquelles les opérateurs de réseau seraient privilégiés dans le rachat des bases clients des opérateurs qu'ils hébergent.
- La possibilité pour l'opérateur hôte de résilier son contrat avec le MVNO dans le cas d'une cession de capital ou de changement de contrôle, empêchant donc de céder sa base client à un acteur autre que l'opérateur hôte.
- La difficulté d'exercer une menace par les prix face aux opérateurs leaders sur le marché. En effet, les MVNO achètent les minutes auprès de ces opérateurs au prix de détail de ces derniers. Leur marge n'est donc pas dépendante de leur capacité d'innovation mais des tarifs imposés par les MNO (Mobile Network Operator).
Mais la liste des obstacles à leur développement ne s'arrête pas là. Dès leur création, ils se voient confrontés à différents challenges, dont deux d'entre eux sont développés ci-dessous :
Cette question englobe d'autres interrogations telles que le choix de la cible (parc client existant/nouveaux segments, marketing de masse/marketing de niche), le discours à utiliser pour chacune de ces cibles, le canal de distribution adaptée à chacune d'elle, la structure d'offre à adopter pour soit multiplier les offres afin de couvrir une cible étendue soit rationaliser les offres sur le haut du marché.
Une des pratiques possibles serait de définir et mettre en oeuvre des structures tarifaires innovantes permettant de s'affranchir de l'opposition entre les forfaits et les cartes prépayées.
Faut-il un moyen d'interaction direct avec le client? Il existe d'autres supports d'interaction tels que le web qui permettent de répondre au besoin de ce type de services.
Le MVNO aurait dans ce cas-ci tout intérêt à lier des partenariats avec d'autres MVNO dans un souci de partage de coûts.
La multitude d'obstacles énoncés démontre bien la complexité pour un MVNO de trouver sa place sur un marché comme celui de la France comptant 3 opérateurs et 9 MVNO indépendants. C'est pourquoi le gouvernement a tiré la sonnette d'alarme en saisissant l'ARCEP au sujet des freins au développement des opérateurs mobiles virtuels sur le marché de la téléphonie mobile après un avis favorable du Conseil de la concurrence à l'allègement des contraintes contractuelles. D'après le récent rapport de ce dernier, les conditions d'hébergements des MVNO sont la principale raison de ce manque de compétitivité des offres, ce qui pourrait expliquer ce retard du marché français par rapport à la moyenne européenne.
Une pression réglementaire semble apparaître auprès des opérateurs en place. Allons-nous assister en France à une réglementation du marché des MVNO à l'instar de l'Allemagne qui a imposé à ses opérateurs de faire bénéficier leurs hôtes des services de marketing interne ?
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