La reconversion, parent pauvre des politiques d…
L’automatisation fait l’objet d’un intérêt fort au sein des Banques de Financement et d’Investissement (BFI).
Au sein des Banques de Financement et d'Investissement (BFI), l’automatisation concerne une part croissante des tâches réalisées par les différentes fonctions des acteurs bancaires, qu’il s’agisse de la prospection des clients, du traitement des différentes informations financières, de la conception de produits ou du passage d’ordre.
Cette course à l’automatisation répondrait ainsi à plusieurs enjeux du secteur de la BFI :
D’une part, l’environnement réglementaire très contraignant et coûteux ainsi que le niveau des taux d’intérêt bas exercent une pression sur les marges bancaires. Les BFI françaises ont publié des résultats à la baisse en 2018 : on enregistre une diminution des revenus des activités de marché et d’investissement à la Société Générale de 8,3% par rapport à 2017 et de 19% sur le quatrième trimestre 2018 par rapport à T4-2017[1]. De même, le Produit Net Bancaire de BNP Paribas CIB baisse de 7,5% par rapport à 2017 et les résultats du quatrième trimestre 2018 du pôle CIB de 9,4% par rapport à T4-2017[2].
D’autre part, les attentes et comportements de la clientèle de la BFI sont en train d’évoluer. Ces derniers sont effectivement à la recherche de plus de flexibilité et d’une expérience client plus digitale et personnalisée.
Avantages associés à l'automatisation du FO
Automatiser les processus des équipes FO (Front Office) améliorerait l’expérience du client à différentes étapes du cycle de vie d’un produit. L’automatisation pourrait se faire dès les premiers contacts avec le client, notamment à travers le recours à des « chatbots ». Lorsqu’ils sont bien mis en œuvre, les « chatbots » proposent des fonctionnalités très performantes pour la relation client notamment grâce à la gestion simultanée de plusieurs demandes, leur disponibilité permanente et leur capacité à s’améliorer grâce aux algorithmes de « machine learning ».
Le passage d’ordre de transaction sur les marchés ainsi que la gestion des opérations courantes, telles que la réconciliation des transactions, peuvent également bénéficier d’un recours à l’automatisation. Lors du suivi post deal, les robots interviendraient pour fournir aux clients des informations et analyses diverses au sujet de leurs investissements ou emprunts, sous le format d’un reporting régulier et/ou à la demande du client.
Ainsi certaines BFI, à l’instar de Deutsche Bank, ont développé un outil permettant de fournir, à la demande du client, des informations sur le statut de transactions réalisées sur les différentes places boursières de manière rapide, efficace et exacte. Ce « chatbot » échange avec les clients via la plateforme de communication « Symphony » largement déployée auprès des institutions financières.
D’autres BFI comme JP Morgan cherchent à mettre au cœur de l’innovation l’automatisation du conseil bancaire où le client aurait accès à des plateformes digitales nécessitant peu ou pas d’intervention humaine, pour par exemple identifier le meilleur moment permettant de réaliser une émission secondaire d’actions (Secondary Stock Offering). Les conseils fournis par la plateforme doivent notamment s’appuyer sur les préférences et objectifs du client concerné et doivent être fondés sur des informations actualisées et sur des hypothèses raisonnables quant aux risques encourus par le client pendant la durée du contrat proposé.
UBS a également recours à des algorithmes afin d’aider des sociétés de capital investissement à trouver des cibles adaptées[3]. La banque passe en revue les données de milliers de sociétés cotées afin de trouver celles qui disposent d’une trésorerie stable et d’activités non cycliques. Sont appliqués par la suite des scénarios de prédiction pour déterminer dans quelle mesure la trésorerie de ces sociétés serait affectée par un rachat. Ces tâches, anciennement assurées par les banquiers juniors, peuvent maintenant être exécutées beaucoup plus rapidement par le déploiement d’algorithmes.
Bien que l’automatisation des processus FO permette aux banquiers de consacrer plus de temps au parcours client (conseil, exécution, suivi post-deal, etc.), celle-ci soulève des interrogations sur les potentielles contraintes réglementaires.
Pourtant la réglementation, par sa complexité, sa sophistication croissante, et la transparence qu’elle impose, oblige à ce que les processus métiers FO soient suffisamment automatisés et favorise ainsi l’investissement dans des nouvelles technologies d’automatisation.
Dans un contexte d’automatisation des marchés, un des volets de MiFID II[4] est d’encadrer le développement du Trading à Haute Fréquence qui représente aujourd’hui 30 à 40% des transactions dans l’Union Européenne, en introduisant des règles spécifiques et des contrôles adéquats pour réduire les risques générés par la vitesse et l’automation.
Si l’on continue avec l’exemple de MiFID II, cette directive a aussi pour autre objectif d’étendre la transparence pré et post trade. Pour ce faire, il est attendu des BFIs de produire des reporting qui décrivent les détails de toutes les transactions tels que la « trading capacity[5] », l’identification de la personne morale engagée dans la transaction ou le lieu exact de l’exécution. Cela revient à tracer l’ensemble des détails autour d’un trade, ce qui rend l’utilisation d’un système de type OMS indispensable (Order Management System[6]).
D’autres régulations comme EMIR, spécifique aux produits dérivés de gré à gré, impose un reporting déclarant les transactions relatives aux contrats dérivés OTC. S’il existe déjà un traitement automatisé des reporting via les trade repository, il est important de s’assurer de la qualité de la donnée et de l’automatisation de l’ensemble des champs requis.
Notes & Références:
[1] Résultats de l’année 2018 – Communiqué de presse Société Générale
[2] Résultats de l’année 2018 – Communiqué de presse BNP Paribas
[3] [Bloomberg News] – Articles – Can Wall Street automate the robot resistant investment banker
[4] Markets in Financial Instruments Directive
[5] La « Trading Capacity » correspond à la nature de l’opération réalisée : Comme indiqué dans le règlement Délégué (UE) 2017/590 de la Commission (champ 29), trois natures d’opérations différentes peuvent être déclarées : négociation pour compte propre, négociation par appariement avec interposition du compte propre ou « toute autre nature d’opération ». La nature d’opération déclarée doit refléter la négociation réellement effectuée par l'entreprise d'investissement, et doit correspondre au reste des informations fournies dans la ou les déclaration(s) de transaction(s) de l'entreprise d'investissement.
[6] « Order Management System » est un système électronique de gestion des ordres qui permet d'automatiser la chaîne de traitement des passages d'ordres.