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Pay As You Drive : Succès limité en France ?

Depuis 2004, en Europe, les assureurs proposent ce qui devait être une révolution en assurance automobile, l'offre Pay As You Drive (PAYD).

Ce type de contrat d'assurance automobile offre une tarification basée sur l'usage qui est fait du véhicule. Cette nouvelle offre est rendue possible grâce aux avancées technologiques. En effet, différents dispositifs de collecte, de réception et d'émission de données sont nécessaires. Généralement, un dispositif installé dans le véhicule assuré enregistre les parcours effectués. Relié à un GPS, il localise continuellement la voiture. Les données sur la position du véhicule, sa vitesse, sont transmises à l'assureur. Ce dernier calcule alors sur cette base la prime de chaque assuré.

Le développement de l'offre s'est fait de façon disparate au sein des pays européens. En France, plusieurs assureurs proposent des contrats PAYD à partir de 2008 (Axa, Allianz, Amaguiz, Macif, MMA, MAAF, Solly Azar ...). Mais les assurés sont peu séduits et le PAYD connait un démarrage et un développement assez lent : les souscriptions de contrats sont limitées. L'offre ne bouleverse finalement pas le marché français de l'assurance automobile.

Plusieurs raisons expliquent ce phénomène :

  • Tout d'abord, les primes de l'assurance automobile en France sont parmi les plus basses en Europe.
  • L'équation économique du PAYD est difficile à atteindre car le dispositif à installer coute cher (environ 300€).
  • Il requiert également une courte immobilisation du véhicule.

L'intervention de la CNIL même si elle a pu ralentir le lancement de certaines offres n'a pas fondamentalement limité les possibilités de tarification personnalisée. Le PAYD ne devant pas enfreindre les libertés individuelles des automobilistes, ces offres ont été minutieusement étudiées par la CNIL. Cette dernière interdit par exemple d'enregistrer les dépassements de vitesse autorisée, les assureurs ne devant pas disposer de données permettant d'identifier des infractions. La MAAF qui en contrepartie garantissait une prime d'assurance diminuée aux jeunes conducteurs, n'avait pu lancer son offre dans la version initialement envisagée.

En Grande Bretagne, Norwich Union, filiale du groupe AVIVA a fait figure de pionner en Europe dès 2004 en lançant un projet pilote sur 2 ans. 5000 véhicules volontaires ont été équipés d'une « black box ». L'objectif de cette étude était de se rendre compte si oui ou non l'offre PAYD présentait un avantage commercial. En généralisant l'offre, une réduction allant de 30% à 50% sur le segment des jeunes conducteurs put être constatée. Mais l'assureur a abandonné son offre en 2008 à cause d'un nombre restreint d'assurés et une technologie trop couteuse.

L'expérience italienne fut quant à elle un succès et le pays fut le 1er à adopter l'offre de manière massive. En 2007, on comptait 1.000 nouveaux adhérents par jour.

Les raisons de ce succès sont multiples. Les boitiers sont loués pour réduire les coûts d'installation. Les primes automobiles sont 2 à 3 fois plus élevées qu'en France, et le coût moyen par accident est relativement plus élevé (33% supérieur à la moyenne européenne en 2005) et la fréquence des sinistres est très importante même si la tendance est à la baisse depuis 2000. De plus, l'Italie connait un niveau de fraude et de vol supérieur aux moyennes européennes, les boitiers équipés d'un système de géolocalisation permettant de retrouver le véhicule en cas de vol sont alors un pré-requis pour assurer certaines catégories de véhicules. Tous ces facteurs combinés et ajoutés au soutien du gouvernement convaincu que ce système modifie positivement le comportement des usagers de la route, a permis l'essor des offres de PAYD en Italie.

Le PAYD, en plus d'être une offre innovante dans le monde de l'assurance automobile, bouleverse les méthodes de calcul des primes. Traditionnellement, la prime payée par l'assuré est calculée en utilisant des lois statistiques qui prennent en compte le degré d'incertitude. Outre les garanties choisies et le bonus/malus, le montant de la prime en assurance automobile est aujourd'hui déterminé en fonction du type de véhicule et des catégories de personnes (exemple : jeunes conducteurs, homme/femme).

Les boitiers PAYD installés dans les véhicules augmentent considérablement la quantité de données exploitables (kilométrage parcouru, types de voies empruntées et zone de circulation, horaires de déplacement...). Ces informations sont exploitées par les assureurs pour permettre un calcul beaucoup plus fin de la prime. Les systèmes de PAYD permettent alors de distinguer de plus nombreux groupes homogènes.

Le PAYD, une solution « ancienne » à un nouveau problème ?

La réglementation européenne ôtera bientôt toute possibilité d'utiliser la différenciation homme/femme dans le calcul des primes d'assurances. Or ce critère était le principal facteur différenciant pour le montant de la prime après le type de véhicule assuré et le bonus/malus. L'usage du PAYD offre une multitude de nouveaux critères à exploiter tout en constituant automatiquement la masse de données nécessaire à un usage statistique. Ainsi le PAYD pourrait offrir aux compagnies un ensemble de solutions à cette nouvelle contrainte réglementaire tout en permettant in fine de proposer des offres différenciantes grâce aux nouvelles données exploitables.

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