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Quel est l’impact de la Règle Volcker sur les banques françaises?

Durant les vacances de fin d'année, nous vous proposons de découvrir ou redécouvrir certains articles à succès publiés cette année sur le blog Finance & Stratégies. Cet article avait été publié sur notre blog le 24/05/2016.

Tandis que l’Union Européenne adopte une approche sectorielle en matière de règlementation bancaire, les Etats-Unis ont promulgué le « Dodd-Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act » (DFA), qui constitue la plus grande réforme du système financier depuis les années 30. La Règle Volcker (section 619 du DFA) interdit et restreint les établissements bancaires dans l’exercice de certaines activités pour compte propre eu égard à leur responsabilité dans la crise financière de 2007-2010.

Qui est Volcker?

En février 2009, le Président Obama a nommé Paul Volcker à la tête de l’Economic Recovery Advisory Board, chargé de le conseiller en matière de politique économique. Convaincu que la stabilité du système financier devait passer par la restriction de certaines activités des banques, Paul Volcker a proposé un ensemble de mesures portant sur les activités de spéculation à haut risque qui avaient occasionné une augmentation du risque systémique.

Après une première version du texte de loi approuvée par la SEC, la Federal Reserve, l’Office of the Comptroller of the Currency et la FDIC, la Règle Volcker a été officiellement adoptée le 10 décembre 2013. Elle a pris effet le 1er avril 2014 avec une date limite de mise en conformité fixée au 21 juillet 2015.

Les activités pour compte propre et les Covered Funds

La Règle Volcker interdit aux établissements bancaires (i) l’exercice des activités de négociation pour compte propre et (ii) l’acquisition ou la conservation de participations, le sponsoring, ou l’exercice de certaines transactions (covered transactions) avec un Covered Fund.

Volcker élargit la définition des activités pour compte propre : il s’agit de l’achat ou la vente, à court terme, d’un ou plusieurs instruments financiers pour le compte d’un trading account. Ces instruments incluent les valeurs mobilières, les produits dérivés, les contrats à terme ainsi que les options sur contrats à terme. En revanche, ils excluent les prêts, les transactions au comptant sur le marché des commodités, les opérations de change au comptant.

La définition d’un Covered Fund est également élargie et plus technique, nécessitant une analyse détaillée. Les Covered Funds incluent généralement les fonds spéculatifs, les fonds de capital-investissement, les OPCVMs, ainsi que certains Fonds Communs de Créances et certaines sociétés d’investissement.

Séparation juridique : interdiction vs cantonnement

Contrairement au Rapport Liikanen et à la loi de Séparation et de Régulation des Activités Bancaires qui prônent la séparation des banques en entités distinctes (banque de dépôt et banque d’investissement) et le cantonnement des activités jugées à haut risque, Volcker interdit expressément certaines activités.

La Règle Volcker contient plusieurs exemptions et exclusions en fonction de la nature de l’instrument financier et de ladite activité, sous réserve du respect de certaines exigences.

A titre d’exemple, les métiers de Fixed Income et Equity Markets sont autorisées à exercer leurs activités de négociation dans la mesure où la banque est capable de démontrer à tout moment qu’elle agit en tant que teneur de marché, que l’activité est clairement définie, justifiable et strictement monitorée. L’exemption Risk Mitigating Hedging sera privilégiée pour les départements Trésorerie du fait de leur rôle de couverture. Les desks en charge de la gestion de la liquidité ne sont pas en reste : l’exclusion Liquidity Management existe ; elle nécessite la mise en place d’un plan de gestion de liquidité remplissant certains critères concernant le type, le montant des titres autorisés, les conditions d’achat et de vente.

Quel impact pour les banques françaises ?

Compte tenu de leur présence sur le sol américain, les 4 principales banques françaises (BNP Paribas, BPCE, Société Générale, Crédit Agricole) sont soumises à la Règle Volcker. Elle exige des établissements de crédits qu’ils établissent un dispositif de conformité reposant sur 6 piliers : politiques & procédures écrites, contrôle interne, gouvernance d’entreprise, audit indépendant, formation et conservation de données.

Concrètement, cela implique pour les banques la classification de l’ensemble de leurs métiers (trading et non trading) en Unités Volcker, qui doivent se prévaloir d’exemption/exclusion pour légitimer l’exercice de leurs activités sous Volcker. Chacune de ses unités se voit détaillées par le biais d’un manuel Volcker et monitorées via le respect certaines limites et indicateurs quantitatifs. La Règle Volcker nécessite également la mise en place d’une gouvernance, afin de veiller au respect de la règle en son sein. Certaines procédures et politiques internes ayant été impactées doivent être revues, tandis que d’autres doivent être définies (notamment concernant les Covered Funds), une formation spécifique dispensée et un dispositif de contrôle permanent adapté. L’implémentation d’un tel dispositif est un prérequis au process de certification annuelle.

L’extraterritorialité et la divergence des régimes réglementaires

La Règle Volcker pose plusieurs défis au niveau des relations transatlantiques. En premier lieu, l’application extraterritoriale de la législation américaine est jugée discriminatoire. Par ailleurs, l’UE et ses membres ont adopté des approches différentes en matière de séparation des activités de banque de dépôt et de banque d’investissement. Ainsi, les deux côtés de l’Atlantique reconnaissent le problème engendré par l’existence des deux règlementations et les possibilités d’arbitrage qui en résultent. Les banques sont les premières à subir le poids de cette dichotomie lorsqu’elles sont contraintes de se conformer, simultanément, à deux régimes différents.

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