La reconversion, parent pauvre des politiques d…
En France, le fracture numérique est une réalité. Que ce soit pour des raisons économiques ou parce qu'elle n'arrive pas à utiliser cette technologie, une partie de la population française ne peut utiliser internet, ...
En France, le fracture numérique est une réalité. Que ce soit pour des raisons économiques ou parce qu'elle n'arrive pas à utiliser cette technologie, une partie de la population française ne peut utiliser internet. Partant de ce constat, sachant qu'aujourd'hui, 91% des 2 755 000 demandeurs d'emploi utilisent internet dans leur recherche, le gouvernement viens d'annoncer la création d'une offre double play à tarif social disponibles uniquement pour les bénéficiaires des minima sociaux. Celle-ci devrait être mise en place à la fin de l'année.
Cette annonce fait suite à l'attribution du label 'tarif social' à 7 offres de téléphonie mobile réservées, elles-aussi aux bénéficiaires du RSA.
Téléphonie Mobile et Sociale
Les opérateurs de téléphonie mobile n'avaient pourtant pas attendu la création d'un label pour proposer des offres à destination des personnes à revenus modestes. En avril 2006, l'opérateur Débitel avait ainsi lancé un forfait sim-only à destination des chômeurs, 20% moins cher. A l'époque, Débitel misait sur une loi autorisant les chômeurs à résilier n'importe quel abonnement, sans préavis et sans frais. Les demandeurs d'emploi représentaient un parc de 2,5 millions de clients potentiels, qui se renouvelait quasiment intégralement chaque année, l'offre à destination des chômeurs était donc considérée comme un moyen d'acquérir et de fidéliser de nouveaux clients, tout en faisant le buzz. Cependant, l'offre n'avait pas eu le succès escompté.
Pour bénéficier du label 'tarif social', les offres devaient respecter plusieurs conditions :
Pour 10€ par mois, proposer 40 min de communication et 40 sms
Etre bloquées à partir de 5€ de hors forfait mais permettre la réception d'appels de façon illimitée
Etre sans engagement, ni de frais de résiliation ou d'activation
Ces critères ont été établis lors d'une table ronde entre Eric Besson et les principaux opérateurs de téléphonie mobile, ces offres ne sont pas subventionnées par l'Etat.
Aujourd'hui, au total 7 opérateurs ont proposé une offre ayant obtenu le label : Auchan Télécom, Oméa Télécom, Coriolis Télécom, NRJ Mobile, Transatel et Zéro Forfait, SFR et Orange. Et actuellement aucun chiffre n'est paru quant au nombre de souscriptions recueillies par ces offres.
Certaines offres de ce type étaient présentes sur le marché avant même la création du label et allaient même plus loin que les conditions imposées (ex : l'offre eco40 de Zéro forfait - 40min+40sms à 7,90€)
Internet et Tarif social
Lors de l'annonce de l'attribution de 5 labels 'tarif social du mobile', Eric Besson et Frédéric Lefebvre ont annoncé le cahier des charges que devront respecter les FAI pour obtenir le label 'tarif social de l'internet' :
inclure un accès illimité à Internet et à la téléphonie fixe pour moins de 23 euros TTC/mois
être disponible pour les allocataires du revenu de solidarité active (RSA) socle
être sans engagement de durée, sans caution ni frais d'activation
Orange a d'ores et déjà annoncé qu'il proposerait une offre respectant ces critères dans moins de six mois.
Cependant, force est de constater qu'il existe déjà sur le marché des offres respectant ces conditions, ainsi Numéricable propose déjà une offre triple play à 9,99€/mois disponibles pour les bénéficiaires du RSA et les adultes handicapés à condition d'être relié au réseau Numéricable, et il existe une offre Alice à moins de 10€.
Réactions des associations de consommateurs
Il est d'autre part important de noter que l'élaboration des conditions de ces labels 'tarif social' s'est effectuée sans la présence d'un représentant de la société civile. Ainsi, les associations de consommateurs n'ont même pas été invitées à la table de débats. En découle des offres qui leur paraissent inadaptées.
Les offres de téléphonie mobile ont été ainsi vivement critiquées par l'UFC-Que Choisir qui regrette qu'on impose aux demandeurs d'emploi de payer chaque mois un prix fixe, qui ne prend pas en compte leurs dépenses réelles. L'association aurait préféré que l'état se tournât vers des offres prépayées utilisables pendant une durée d'utilisation plus longue (1 mois pour 15min) et avec une minute moins chère (15cts au lieu de 45cts actuellement ).
Concernant les offres internet, l'UFC-Que choisir a fait savoir qu'elle ne les trouvait pas adaptées et trop chères. Ainsi, 23€ ce n'est pas suffisamment différenciant selon l'association (le prix moyen d 'une offre triple-play en France tourne autour de 30€). L'UFC-Que Choisir explique qu'à plus de 10€, une offre ne peut véritablement être accessible par les foyers à revenus faibles. Elle propose d'appliquer la même baisse au prix de l'internet social qu'à celui du service universel de la téléphonie fixe (le tarif du service universel de la téléphonie fixe est d'environ 6€, normalement celui-ci est de 16€, il est subventionné par l'état et France Télécom). Le nombre de bénéficiaires du service universel de téléphonie fixe a baissé de moitié entre 2004 et 2009, rendant disponible l'argent prévu pour la subvention.
Distorsion concurrentielle
L'association pointe du doigt le fait qu'aucun FAI autre qu'Orange (et Numéricable qui possède son propre réseau) ne pourra proposer une telle offre. Ainsi, en cas de dégroupage, les opérateurs doivent s'acquitter auprès de l'opérateur historique de presque 10€ par client et par mois pour un accès à la boucle locale, empêchant une offre à 20€ d'être viable économiquement. Orange se retrouverait dès lors en position monopolistique, et la difficulté à changer de fournisseur lui permettrait de conserver ces clients 'tarif social'.
En conclusion, la lutte contre la fracture numérique était un des objectifs du gouvernement, qui avait même fait du déploiement du très haut débit, une priorité du Grand Emprunt. Dans le cadre d'une recherche d'emploi, l'accès à internet est primordial et il est important de mettre un place un moyen pour que les bénéficiaires du RSA aient accès au numérique. Cependant, les offres 'tarif social' téléphonie mobile et internet fixe ne paraissent pas adaptées à ce stade. Elaborées sans concertation avec la société civile, leur coût reste trop élevé pour être accessible par les foyers à revenus faibles.
De plus, les critères à respecter pour qu'une offre bénéficie du label tarif social ne lui permettront pas de se démarquer sur le marché, certaines offres respectant les conditions des labels existaient d'ailleurs avant la création de ceux-ci.
Enfin, de sérieux risques pèsent sur la concurrence et pourrait de manière collatéral favoriser l'opérateur historique.
Sia Partners
Octobre 2011
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