Benchmark des Plateformes de Gestion de la…
Le futur de la finance prend forme à une vitesse fulgurante. De nombreux services financiers décentralisés émergent et attirent de plus en plus d'utilisateurs et de capitaux.
Dans cette publication, nous vous présentons un entretien avec Julien Bouteloup, l'un des piliers de cet écosystème.
Fort d'une formation en génie électrique et d'une expérience de serial entrepreneur nomade et de business angel, Julien Bouteloup est passionné par le risque. Depuis l'âge de 14 ans, il est adepte de mathématiques, de code et d'intelligence artificielle. Il découvre Bitcoin en 2010 et Ethereum en 2015 et réalise le potentiel disruptif de la technologie blockchain dans le secteur financier. Il contribue à la construction de plusieurs protocoles, et accompagne l'innovation constante du secteur en proposant de plus en plus de services financiers renforçant cet écosystème, et fonde Stake Capital en 2018.
En parallèle de ses activités, il participe activement à l'éducation du grand public sur ce qui représente pour lui la nouvelle révolution industrielle : la blockchain. Au-delà d'être un geek insatiable, il revendique une vision et travaille à sa réalisation.
Pourriez-vous vous présenter et nous expliquer la genèse de votre intérêt pour la finance décentralisée ?
Après des classes préparatoires classiques, j’ai étudié l’informatique aux États-Unis en me spécialisant dans le machine learning. J’ai ensuite travaillé pour la sécurité et la défense en Europe. Sur le plan personnel, j’ai profité de la capacité de stockage de données et de puissance de calcul dont je disposais afin d'exécuter des algorithmes. Le premier réalisait des analyses astronomiques. Le deuxième était Bitcoin, en 2010.
C’est un peu plus tard, en 2015, que j’ai découvert Ethereum qui offrait une toute nouvelle perspective. Là où Bitcoin serait une réserve monétaire, Ethereum serait le nouveau monde d’Internet. Cela présageait une transformation complète de notre société, et c’est ce qui m’a tout de suite intéressé et poussé à lancer plusieurs projets.
Suite à l'apparition des premiers réseaux sécurisés par le Proof of Stake[1], j’ai créé une plateforme de staking-as-a-service, permettant à différents acteurs de valider les transactions de différentes blockchains via la mise en gage de leurs actifs. C’est ainsi que Stake Capital[2] a vu le jour.
Depuis, j'ai pu créer et participer à de nombreux projets décentralisés, tels que Stake DAO, Curve ou encore BlackPool.
Qu’est-ce qui vous a poussé à créer un fonds d’investissement décentralisé de NFT ?
BlackPool a été créé il y a un an à la suite d'un investissement personnel dans la plateforme Sorare[3]. Si j'ai commencé par jouer moi-même, il est rapidement devenu plus intéressant d'employer des personnes expérimentées en la matière afin de gérer les actifs de manière plus rentable.
BlackPool est l'étape suivante, il s’agit d’un fonds décentralisé qui collecte des NFT de jeux, et les délègue à des joueurs expérimentés. Les joueurs obtiennent leur rémunération, et le fonds récupère le reste, permettant aux propriétaires de jetons BPT, notre token de gouvernance, de générer des revenus.
Pour le moment, nous nous concentrons principalement sur les NFT de type “play-to-earn”, puisqu'ils permettent de générer des revenus passifs[4]. Au contraire, les NFT spéculatifs comme les CryptoPunks[5] sont des investissements plus risqués et incertains car ils sont principalement spéculatifs et dépendent de la dynamique du marché.
Notre fonds est divisé en plusieurs "verticales", une pour chaque jeu dans lequel nous investissons, mais également des verticales de NFT collectibles, tels que les Hashmasks[6].
À titre d'exemple, notre verticale Axie Infinity[7] est composée de 634 "scholars", qui sont des personnes qui se consacrent à jouer avec les NFT que nous leur déléguons. La plupart d'entre eux sont de jeunes joueurs issus de pays en voie de développement, et ce mécanisme leur permet de percevoir un revenu substantiel au regard de leurs zones économiques, qui ont particulièrement été affectées par la récente crise sanitaire[8].
[4] Gagner des cryptomonnaies avec le Play to Earn
[5] The Fat CryptoPunks Thesis
[6] The Hashmasks - Site officiel
Passons maintenant à votre projet phare, en quoi consiste Stake Capital ?
Stake Capital est la première entité que nous avons créée, il s’agit d’une plateforme de staking-as-a-service permettant la mise en gage d’actifs numériques dans le but de sécuriser des protocoles et par l’occasion d’obtenir un rendement sur ces actifs.
Au-delà des rendements générés, il y a également une dimension de lobbying dûe à l’accumulation de droit de vote par les validateurs du réseau[9]. Ces droits de vote permettent indirectement aux validateurs d'intervenir sur les marchés, et de réorganiser les transactions à valider afin d'en tirer un profit : on parle de MEV[10] (Miner Extractable Value). Il faut savoir que depuis le 1er janvier 2020, plus de 700 millions de dollars ont été extraits par les mineurs et autres entités participant aux opérations de MEV, sur la blockchain Ethereum seulement[11].
Aujourd’hui, nous nous concentrons sur d’autres opérations financières, telles que les liquidations, l’arbitrage ou encore la tenue de marché. Nous avons également une dimension orientée vers l’investissement, tout comme n’importe quel quantitative hedge fund, avec une approche traditionnelle, qui opère essentiellement dans le marché de la finance décentralisée (DeFi). Nous avons d’ailleurs investi dans plus d’une centaine de projets.
Enfin, nous nous orientons depuis peu vers la gestion de trésorerie, en proposant aux institutionnels des rendements conséquents provenant des infrastructures de la DeFi. C’est exactement ce que nous avons fait dans le cadre de notre partenariat avec SwissBorg[12], qui peut ensuite revendre ce rendement à ses propres clients.
[9] Les validateurs sont les acteurs qui sécurisent le réseau. Parmi leurs missions, ils sont chargés de valider toutes les transactions qui passent par le réseau, et de créer des blocs regroupant ces transactions.
Vous avez évoqué le concept de MEV, pouvez-vous nous en dire davantage ?
Le MEV est l'extraction des données des transactions en cours de validation, et l'exploitation de celles-ci. Lorsqu'un utilisateur effectue une transaction, imaginons le transfert d'un ether vers une adresse tierce, cette transaction se retrouve alors dans le mempool[13], qui est une antichambre des transactions non validées. Les mineurs peuvent alors créer des blocs en rassemblant les transactions du mempool. Le MEV intervient juste avant la validation par le mineur, au niveau du mempool. Il fait intervenir des groupes d'acteurs qui extraient des informations sur les transactions non validées par les mineurs, et les utilisent à leur avantage. Par exemple, un utilisateur peut détecter une différence de prix sur la même paire d'actifs dans deux marchés distincts. L'utilisateur effectuera alors une transaction d'arbitrage[14] pour équilibrer les prix entre ces deux marchés et réaliser ainsi un bénéfice. Avant d'être validée par un mineur, cette transaction sera dans le mempool et pourra être vue par tous, puisque le mempool est public. Un acteur pourra donc comprendre que cette transaction est un arbitrage sans risque et pourra copier cette même transaction en offrant une rémunération plus élevée au mineur, et ainsi obtenir un profit au détriment du premier utilisateur.
Avec Stake Capital et StakeDAO, nous consacrons un budget important à AWS (Amazon Web Services, le service Cloud d’Amazon) afin de posséder nos propres nœuds valideurs, et ainsi privilégier nos propres transactions MEV. Nous utilisons également EDEN Network[15], afin d’envoyer nos transactions directement aux mineurs sans passer par le mempool.
Cependant, les conséquences du MEV sont multiples pour l'utilisateur final : sandwich attacks[16], front-running[17], etc. Enfin, la surenchère des frais de transaction par les participants au MEV entraîne des frais de transaction plus élevés pour l'utilisateur moyen.
[13] Qu'est-ce que le mempool d'une blockchain ?
[15] Multicoin Capital: Tokenizing MEV
Quelle serait votre solution pour que la MEV n’impacte que très peu l’utilisateur moyen ?
Plusieurs solutions ont déjà été conceptualisées et implémentées afin de réduire l’impact du MEV sur les utilisateurs des réseaux blockchains.
Parmi celles-ci, Flashbots[18] permet de placer la mise aux enchères des transactions MEV en dehors de la blockchain Ethereum, et de la déporter vers des canaux directs entre mineurs et traders. L'impact direct est le désengorgement du réseau Ethereum, ce qui rend les frais de transaction moins onéreux que de coutume.
J'ai également mentionné EDEN Network, qui crée un système d'incitation circulaire entre les mineurs, les traders et les "Slot Tenants[19]”. Les traders peuvent directement envoyer leurs transactions au réseau sans passer par le mempool, et elles sont traitées de manière à maximiser le gain pour l'ensemble de l'écosystème.
Une troisième solution a été explorée, et a même été mise en œuvre par Optimism[20], une des solutions de mise à l'échelle d'Ethereum. Cette solution consiste à désigner un acteur qui sera chargé de séquencer les transactions pour une période donnée. La désignation de cet acteur se fait via une enchère, c'est pourquoi ce concept est appelé MEVA : MEV Auctions[21]. Cela peut évidemment être dangereux puisqu'un acteur pourrait corrompre le système via son enchère et prioriser les transactions de manière malveillante, mais coupler cette idée à de la randomisation et à un système de réputation pourrait être intéressant à explorer. Quoi qu'il en soit, il s'agit toujours de concilier les incitations économiques de tous les acteurs pour parvenir à un système circulaire qui profite à tous.
[18] Flashbots: Frontrunning the MEV Crisis
[19] EDEN Network: Slot Tenants
[20] Paradigm Research: How does Optimism's Rollup really work?
[21] MEV Auction: Auctioning transaction ordering rights as a solution to Miner Extractable Value
Vous êtes la première personne à avoir réalisé un flashloan, pourriez-vous nous en exposer le déroulé ?
Tout d'abord, il conviendrait d'expliquer le concept de flashloan. Il a été introduit par Aave[22], une plateforme permettant de contracter une dette contre le dépôt d'un collatéral, au même titre que les lignes de crédit en finance traditionnelle. Le flashloan, quant à lui, est une dette où le dépôt de garantie n'est pas nécessaire, puisque la dette est contractée puis remboursée dans la même transaction. Le risque de défaut est donc nul (la transaction, et donc l’emprunt, ne peut s'exécuter que si le prêt est remboursé dans la même transaction que l’emprunt). Ce concept permet donc de réclamer de la liquidité que l'on ne possède pas forcément, et de faire des actions sur le marché avec cette liquidité.
Lorsque cette fonctionnalité a vu le jour, j'ai contacté l'équipe d'Aave afin de faire valider le mécanisme, ce qui m'a permis de véritablement l'expérimenter. Il y avait peu d'opportunités à ce moment-là et les coûts d'emprunt étaient relativement élevés, cela a donc été principalement fait pour le plaisir.
Ce concept permet de faciliter des mécanismes fondamentaux du marché, comme les liquidations ou les arbitrages, qui sans eux, le marché n'existerait pas. Il permet également à n'importe qui de réaliser des actions que seuls les fonds de capital-risque ou les hedge funds pouvaient entreprendre auparavant.
Rekt . Pourquoi avoir créé ce média, quelle en était la motivation ?
J'ai commencé à écrire des articles en 2017, dans lesquels je dénonçais les fraudes et escroqueries provenant des ICO. J'ai été, de ce fait, poursuivi à de nombreuses reprises pour des déclarations diffamatoires, pour avoir communiqué des informations qui se sont avérées vraies. J'ai alors réalisé que je devais changer mon approche, et j'ai créé un nouveau média avec deux associés. Nous étions en accord sur la ligne éditoriale puisque nous souhaitions créer un média technologique d'investigation "underground" centré sur les hacks dans l'univers de la DeFi.
Il faut noter que Rekt[23] se veut être un média agnostique sans parti pris, et que le lecteur est incité à s'informer et à se forger sa propre opinion sur un sujet donné.
Nous avons également intégré quelques éléments dissimulés dans notre projet, à savoir le système de parloir[24] qui n'est pas directement accessible depuis notre site Web, ou le journal physique que nous avons publié à l'occasion de la Ethereum Community Conference de 2021.
Hopium Diaries : avez-vous participé à la production ? Est-ce une vision que vous partagez ?
Mon équipe et moi-même partageons cette vision depuis un certain temps. La production a été réalisée par une personne ayant pris contact avec moi il y a près d'un an et que j'ai intégrée à mon équipe.
Pour synthétiser cette vision, elle fait référence au conflit mené par les états-nations dans le but de détruire ou de contrôler certains protocoles, avant qu'une décentralisation totale ne se produise. Hopium Diaries[25] nous a permis de formuler cette vision, et de la rendre plus tangible.
Les hacks sont inévitables, les plus grands protocoles n’y échappent pas. Comment les protocoles devraient-ils se couvrir contre ce type d’évènements dits “cygne noir” sur le long terme ?
Pour se prémunir des hacks, les développeurs doivent avant tout s'assurer que leur code est robuste et qu'il ne contient aucune faille. Il est indispensable d'obtenir un avis externe sur sa qualité en l'auditant.
Au-delà de la qualité du code et des failles qu'il pourrait contenir, il est nécessaire de se projeter et d'anticiper les usages qui pourraient en être faits. Ne penser qu'au cas d'utilisation général du programme peut être dangereux car il n'est généralement pas isolé. D'autres protocoles gravitent autour de ce programme, et permettent d'interagir avec lui. Il est donc nécessaire de prendre en compte toutes les attaques économiques ou de gouvernance qu'il pourrait subir, y compris l'utilisation de flashloans.
Pour s'en protéger, la première chose à faire est d'isoler les composants du smart contract. Par exemple, lorsqu'on compare l'architecture de Balancer[26] et de Curve, on se rend compte de la différence en termes de résilience entre ces deux protocoles. Balancer utilise le même Context pour toutes ses réserves de liquidité, ce qui signifie qu'un détournement sur l'une des réserves implique que les autres peuvent également être soumis à ce détournement. Curve, en revanche, isole chacune de ses réserves, ce qui limite la surface d'attaque si l’une de ces dernières venait à être attaquée.
Il peut également être intéressant de se demander si le programme peut être isolé du reste de l'écosystème. L'inconvénient est qu'il ne peut pas être intégré à d'autres protocoles, mais il sera plus sécurisé.
Enfin, il est essentiel de prendre en considération l'avis externe d'un spécialiste de la tokénomie, qui sera en mesure de déterminer les sources possibles d'attaques économiques ou de gouvernance.
D'autre part, à titre préventif, il est essentiel d'assurer le protocole. Cela peut se faire via des protocoles d'assurance décentralisés, comme Nexus Mutual[27]. C'est ce que nous avons fait avec Stake DAO.
Toutefois, l'idéal serait de souscrire à un contrat d'assurance traditionnel, notamment car il proviendrait d'un système qui n'est pas issu du même contexte économique. Il serait d'ailleurs intéressant que des assurances décentralisées comme Nexus Mutual soient elles-mêmes assurées par des assurances traditionnelles, à la manière de réassureurs comme la Scor.
[26] Vision de Fernando Martinelli, Fondateur et CEO de Balancer
[27] Nexus Mutual and Defensibility in Cryptonative Insurance
StakeDAO est souvent qualifié de “the one stop shop to DeFi” ou encore “the Disneyland of DeFi”, pourquoi ces surnoms ?
L’objectif premier de StakeDAO[28] est de se placer sur le marché des DEX (places d’échange décentralisées). Nous le savons depuis un certain temps, mais les CEX (places d’échange centralisées) tels que Binance, Coinbase ou encore FTX feront face à des contraintes réglementaires fortes. C’est d’ailleurs déjà le cas pour Binance, qui est dans le viseur de plusieurs juridictions[29]. Au fil du temps, nous pensons que le marché de l’échange centralisé se déplacera vers l’échange décentralisé. C'est un marché significatif, qui concentre d'importants capitaux et flux financiers, et l'objectif de StakeDAO est d'en acquérir une partie.
Pour ce faire, nous devons offrir une expérience utilisateur similaire aux CEX, proposer des prix attractifs, mais aussi mettre en place des services supplémentaires qui permettent de faire fructifier ses actifs. Nous avons donc créé des stratégies d’investissement pour l’Euro, le Dollar, le Bitcoin et l’Ether, aux rendements concurrentiels. Par ailleurs, nous souhaitons également mettre à la disposition des utilisateurs des produits dérivés, tels que des options, des contrats à terme, etc.
Le but n'est certainement pas de donner accès à l'ensemble de la DeFi, car l'innovation est bien trop rapide pour que quiconque parvienne à la maîtriser dans sa globalité, mais plutôt de donner accès à une liste de produits que nous avons soigneusement sélectionnés, afin que nos utilisateurs puissent tirer le meilleur parti de ce marché.
Au lancement de StakeDAO, nous avons tout d'abord mis en place des stratégies d'investissement car elles nous permettent d'accumuler des droits de vote sur Curve[30]. Curve est un DEX permettant à ses utilisateurs d’échanger des jetons avec un glissement de prix[31] très faible. Ces échanges sans glissement de prix sont permis puisque les paires de liquidité disponibles sur Curve comportent toutes des actifs ayant un prix similaire entre eux. Accumuler ces droits de vote nous permet ensuite de tirer parti de Curve, d'améliorer le rendement de nos stratégies d'investissement, qui se basent essentiellement sur ce DEX, et de permettre à nos utilisateurs d'échanger leurs jetons à moindre coût. Il est important de noter que pour être sur la liste blanche de Curve, nous avons dû investir près de 45 millions de dollars, à une époque où leur jeton de gouvernance était beaucoup moins valorisé qu'aujourd'hui. Il existe une forme de jeu de pouvoir autour de ce protocole, où plusieurs entités tentent de capturer un maximum de droits de vote[32]. Aujourd'hui, StakeDAO est sur leur liste blanche[33], et nous aidons d'autres protocoles décentralisés comme Frax[34], et prochainement Rari Capital[35], à tirer parti de Curve.
[28] Stake DAO - Site officiel
[29] Attaqué de toute part, Binance donne des gages et tente de rentrer dans le rang
[30] DeFi Deep Dive #8: Curve Finance
[34] Alpha Leak: The Algo Coin to End All Algo Coins - Sam Kazemian, Frax
Vous venez d’évoquer Curve, qui se veut être “le DEX sans glissement de prix”, mais lorsque l’on voit l'apparition de la pool tricrypto, est-il légitime de se demander si la vision long terme du protocole est indemne ?
En effet, pour que Curve parvienne à atténuer le glissement de prix, et à offrir aux utilisateurs la possibilité d’échanger d’importants montants sans conséquence, il a initialement été choisi de ne mettre en place uniquement des paires d’actifs ayant un prix similaire. Par exemple, il est possible d’échanger des USDT contre des USDC, qui ont tous deux vocation à être indexés sur le dollar. Il est également possible d’échanger des WBTC contre des sBTC, qui sont tous deux indexés sur le Bitcoin. Il n’est donc pas possible de déséquilibrer les réserves de liquidité[36] en termes de valorisation puisque pour chacune d’entre elles, l’ensemble des actifs qui s’y trouvent ont un prix similaire. Par conséquence, les fournisseurs de liquidité ne peuvent pas subir d’”impermanent loss[37]”, et les utilisateurs ne peuvent pas subir de glissement de prix.
Seulement, les mathématiques évoluent, et la pool tricrypto[38] est le résultat de cette évolution[39]. Les simulations de cette réserve de liquidité nous montrent bien que le glissement de prix ainsi que l’impermanent loss reste fortement atténué, et ce malgré la différence de prix des actifs qui composent la pool tricrypto.
[36] How do liquidity pools work?
Plusieurs protocoles tentent de s’attaquer au problème de l’impermanent loss, tout comme Bancor. Quelles seraient les autres solutions pour le résoudre au moyen ou long terme ?
Plusieurs méthodes peuvent être mises en œuvre pour contourner l’impermanent loss sur des échanges entre assets ayant des prix différents.
Celle que nous avons implémentée sur Curve est en collaboration avec Synthetix[40]. L’idée est simple : Synthetix permet de créer des actifs synthétiques à partir de leur token de gouvernance. Les utilisateurs déposent des SNX dans le protocole, et peuvent prendre une dette par dessus ce dépôt à un ratio de collatéralisation de 750%. Cette dette prend la forme de l’actif synthétique choisi, qui sera indexé à l’actif sous-jacent. On peut donc déposer des SNX et emprunter des sBTC, des sETH ou encore des sUSD qui suivront le cours de leur actif sous-jacent. Ce mécanisme permet par exemple de pouvoir échanger des sBTC contre des sUSD sans aucun glissement de prix puisque ces actifs ne sont qu’une représentation virtuelle de l’actif sous-jacent, et qu’ils tirent leur valeur du collatéral : le SNX. Imaginons donc que nous voulons échanger des BTC contre des DAI[41]. Pour ce faire, on échange les BTC contre des sBTC via une pool Curve, les sBTC sont ensuite échangés contre des sUSD sur Synthetix sans aucun glissement de prix, puis les sUSD sont convertis en DAI sur Curve. Il en résulte une transaction avec un très faible glissement de prix, et les fournisseurs de liquidité sont également très peu exposés à l’impermanent loss.
[40] Synthetix - Site officiel
[41] Stablecoin adossé au dollar