La reconversion, parent pauvre des politiques d…
Depuis son entrée en vigueur en 2017, la loi Sapin II porte la législation française aux meilleurs standards européens et internationaux en matière de lutte contre la corruption. Cependant, sa réussite ne saurait éclipser ses besoins d’évolutions pour répondre aux nombreux enjeux actuels.
Le 19 octobre 2021, une proposition de loi très attendue visant à amender la loi Sapin II du 9 décembre 2016, a été déposée.
Trois éléments majeurs sont à retenir de cette proposition, qui reprend les recommandations du rapport d’évaluation de la loi Sapin II (cf. la section ci-dessous “Pour aller + loin”) :
Dans l’ensemble, les évolutions proposées ne viennent pas modifier les fondamentaux de la loi Sapin II. Ainsi, les dispositifs de conformité Sapin II actuellement en place dans les entités soumises peuvent perdurer et se renforcer, sans remise en cause ou incertitude législative.
Ainsi, la proposition de loi aboutirait à la création d’un cadre légal de lutte anticorruption “à deux têtes”, avec des responsabilités et des contrôles partagés entre l’AFA et la HATVP.
Une collaboration entre les deux entités sera plus que nécessaire, afin d’apporter une cohérence et une efficacité dans les recommandations, les investigations et les sanctions, dans le même objectif que les protocoles de coopération signés entre l’AFA et des autorités comme l’AMF ou le PNF ; dans une logique globale d’unité dans l’approche de la conformité française.
Par ailleurs, une proposition de loi a également été déposée le 21 juillet 2021 visant à l’amélioration de la protection des lanceuses et lanceurs d’alertes, l’une des 8 mesures de la loi Sapin II. Cette proposition de loi vise à transposer la Directive européenne adoptée en 2019, qui laissait aux Etats membres jusqu’à la fin de l’année 2021 pour transposer.
Cette proposition de loi s’inscrit donc dans une démarche européenne d’harmonisation mais surtout de renforcement des standards relatifs à la protection de ces personnes. Pour rappel, la Directive prévoit une clause dite de non-régression, qui permet de garantir que les acquis de la loi Sapin II ne soient pas remis en cause à l’occasion de la transposition.
Cette proposition de loi a été adoptée le mercredi 17 novembre 2021 après amendements en première lecture à l'Assemblée nationale, suite à l’engagement de la procédure accélérée sur le texte le 25 octobre 2021.
Les principales évolutions réglementaires portent sur les objets suivants :
De manière globale, ces évolutions législatives viendront renforcer le cadre réglementaire français de lutte contre la corruption, afin de placer la France et ses acteurs publics comme privés aux meilleurs standards européens et internationaux en la matière.
Dans vos organisations, des actualisations des dispositifs seront requises. Les actions suivantes devront par exemple être étudiées :
Dans ce contexte porteur de changements importants, les regards restent tournés vers les prochains arbitrages législatifs. D’ores et déjà, les acteurs concernés peuvent en anticiper les impacts en s’assurant de leur bonne conformité aux exigences actuelles, en renforçant leur veille réglementaire, et en alignant leur organisation sur les mutations en cours de l’environnement réglementaire.
Malgré la mise en application de la loi Sapin II et une amélioration globale de la lutte contre la corruption dans le pays, la France se positionne à la 23ème place (en recul par rapport à 2018 où la France occupait la 21ème place) au classement mondial de perception de la corruption, le Corruption Index, réalisé chaque année par l’ONG Transparency International.
Il semble donc approprié de tirer les leçons des 5 années d'existence de cette loi pour l'adapter aux nouveaux enjeux actuels de la lutte contre la corruption à l’échelle internationale.
C’est dans cette optique qu'est créée en décembre 2020 la mission d’évaluation de la loi Sapin II, soit 4 ans après l’adoption de ladite loi. Les députés Raphaël Gauvain (LaREM, Saône-et-Loire) et Olivier Marleix (LR, Eure-et-Loir) ont travaillé pendant plus de 5 mois, afin d'échanger avec l'ensemble des acteurs concernés, privés ou publics, au travers de 49 auditions et 8 tables rondes.
Au terme de leurs travaux, ils ont formulé 50 recommandations publiées en juillet 2021 sous la forme d’un rapport d’évaluation et visant :
De ces 50 propositions est née une proposition de loi, déposée par M. Raphaël Gauvain le 19 octobre 2021, et qui doit désormais faire l’objet de discussions.
Rappel de ces différentes étapes dans frise suivante :
Les prérequis de la loi Sapin II sont toujours autant d’actualité et continuent de marquer un important tournant dans le paysage légal français et cela grâce à plusieurs avancées :
Aujourd'hui encore, se mettre en conformité avec la loi Sapin II constitue donc un challenge pour les entreprises assujetties, aussi bien en termes de capacité à répondre aux différentes exigences de la loi, qu'en termes de capacité à assurer le suivi de ses évolutions règlementaires.
En effet, s’ajoute à la mise en place du programme de conformité Sapin II et à la veille réglementaire un suivi et une vigilance en matière judiciaire, notamment liés à l’activité du Parquet National Financier (PNF) et la conclusion des CJIPs (Convention Judiciaire d'Intérêt Public). Pour rappel, la loi Sapin II instaure au travers de la CJIP un dispositif procédural transactionnel de règlement des procédures ouvertes contre des personnes morales, notamment en matière de corruption active ou passive, de trafic d'influence, de fraude fiscale, etc.
Concernant la mise en place du programme de conformité Sapin II, la loi impose plusieurs obligations concrètes aux entreprises assujetties. Ces obligations sont structurées autour de 3 grands piliers, comme l’a rappelé l’AFA dans ses recommandations actualisées en 2021.
Ce dernier pilier de gestion des risques s’articule lui-même autour de 3 grands axes constitutifs d’une démarche globale et intégrée de lutte contre la corruption :
1° Prévenir les risques
2° Détecter les faits
3° Remédier les risques
Notons que ces différentes obligations sont actuellement conditionnées à 3 critères cumulatifs : avoir un effectif de plus de 500 employés, réaliser un chiffre d'affaires annuel (filiale ou consolidé) supérieur à 100 millions d'euros, et surtout disposer de son siège social en France. Mais avec la proposition de loi Sapin III, ce dernier critère serait supprimé.
Dans l'attente des prochains arbitrages législatifs, nous restons en veille afin de vous proposer un accompagnement personnalisé dans la mise en conformité de votre dispositif anticorruption. N’hésitez pas à nous contacter pour échanger !