La reconversion, parent pauvre des politiques d…
D’abord confidentiels et réservés à quelques initiés dans les années 90-2000, les produits alimentaires issus de l’agriculture biologique sont sortis de leur cadre et sont promis à un bel avenir avec un marché prévisionnel de 9,3 Milliards d’euros en 2020**.
D’abord confidentiels et réservés à quelques initiés dans les années 90-2000, les produits alimentaires issus de l’agriculture biologique sont sortis de leur cadre et sont promis à un bel avenir avec un marché prévisionnel de 9,3 Milliards d’euros en 2020**. Après des années de croissance continue, le marché et ses acteurs ont atteint des tailles significatives. Ils doivent désormais se structurer et professionnaliser la filière en vue de répondre à l’évolution de la demande.
Créé en 1985, le label Agriculture Biologique, aussi appelé label AB, permet de garantir que les produits labélisés sont composés à 95% d’aliments issus d'une agriculture respectueuse des équilibres écologiques tels que la préservation des sols et des ressources naturelles. Pour obtenir le logo, les professionnels doivent être certifiés par des organismes indépendants agréés par les pouvoirs publics : Aclave, Ecocert, Qualité France, Ulase...
En France, « le bien manger » s’est développé jusqu’à devenir une composante culturelle incontournable. En 2015, 92% des français considéraient l’alimentation comme un élément essentiel de leur mode de vie et 81% d’entre eux étaient convaincus qu’une alimentation saine et variée est la meilleure manière de préserver sa santé devant le fait de bien dormir et de faire du sport.
Aujourd’hui, cette tendance se traduit dans les habitudes de consommation des français. En effet, 70% d’entre eux consomment des produits bio au moins 1 fois par mois et 90% en ont déjà consommés sur les 12 derniers mois.
Cette tendance de fond permet, depuis plus de 10 ans, une croissance constante et soutenue du marché.
Le marché bio se caractérise notamment par la variété de ses canaux de distribution. On en dénombre 4 principaux parmi lesquels les consommateurs peuvent choisir : la vente directe auprès des agriculteurs et maraîchers, les artisans et sur les marchés, la grande distribution représentée par les GMS et les Drives, la distribution spécialisée et la restauration collective.
En réponse à l’évolution impressionnante du bio en France depuis une dizaine d’années, les acteurs de la grande distribution ont eux aussi investi ce marché et dominent aujourd’hui l’offre alimentaire biologique : 49% des ventes en volume en France en 2016 devant les magasins spécialisés à 35% (source Biocoop).
D’autant plus qu’il s’agit d’une manne financière intéressante, les marges étant supérieures sur l’alimentaire biologique que sur les produits conventionnels. D’après une étude de la revue spécialisée Linéaires, les produits bio seraient en moyenne 58% plus chers que leurs homologues conventionnels même s’il faut noter que cet écart tend à se réduire.
Certaines enseignes se démarquent déjà, Carrefour était ainsi en 2015 le premier distributeur de produits bio en France toutes enseignes confondues avec plus de 20% de parts de marché et une croissance à +11%.
L’enseigne ne compte pas s’arrêter là. Carrefour développe également sa propre enseigne de proximité dédié aux produits biologiques : Carrefour Bio. Le distributeur qui inscrit le déploiement de cette enseigne dans un programme plus large « Bio 2021 » souhaite déployer 150 points de vente Carrefour Bio d’ici 2021.
Les autres acteurs de la Grande Distribution ne sont pas en reste et commencent eux aussi à ouvrir des enseignes spécialisées bio. Par exemple, Casino poursuit son déploiement de magasins sous l’enseigne Naturalia et Auchan teste deux concepts de magasins Bio sous la marque « Cœur De Nature ». Le distributeur nordiste ouvrira également cette année un magasin « Auchan Bio » à Lille afin d’adapter son concept de magasin spécialisé. Intermarché, Leclerc et Système U expérimentent également des projets bio avec des initiatives plus locales. Au final, les GMS peuvent espérer une croissance sur les prochaines années car 69% des français aimeraient trouver davantage de produits bio en grandes surfaces selon un le baromètre Agence Bio / CSA 2015.
Canal de distribution majoritaire devant la grande distribution en 2007, les magasins de distribution spécialisés connaissent une plus forte croissance que les GMS depuis 2012.
Créé en 1986, Biocoop est l’enseigne leader en termes de chiffre d’affaires et de parc de magasins : 950 M€ en 2016 et 431 points de vente (perspective à 1,2 Md€ et environ 500 magasins en 2017), mais de nouvelles chaînes gagnent rapidement des parts de marché comme Bio c’ Bon, NaturéO, La Vie Claire, …
Principaux concurrents des GMS, les magasins spécialisés ne visent toutefois pas la même clientèle. Cette dernière est plus exigeante et sélective sur les produits et les marques proposées. C’est pourquoi les GMS limitent le nombre de marques distributeurs bio dans leurs propres magasins spécialisés bio.
La vente directe correspond à la filière historique du bio et regroupe les acteurs suivants :
Ce canal de distribution connaît un regain d’intérêt ces dernières années avec la mise en avant des circuits courts, notamment des AMAP, qui rapprochent les producteurs des consommateurs en limitant au maximum le nombre d’intermédiaires.
En 2016, 76% des sondés se disaient favorables « au vote d'une loi imposant l'introduction d'aliments issus de l'agriculture biologique, locaux et de saison dans la restauration collective publique » selon le Sondage IFOP pour « Agir Pour l’Environnement ».
Pourtant ce ne sera pas le cas, la proposition de loi visant 20% de produits bio dans les cantines d’ici 2020 n’entrera pas en vigueur. Après avoir été votée par l’assemblée nationale, le Senat a saisi le Conseil Constitutionnel qui l’a rejeté pour non-respect de la procédure parlementaire.
Cependant, ce report ne semble que temporaire. Le développement du bio dans la restauration collective a fait son entrée dans la campagne présidentielle française et figurait au programme de nombreux candidats. Le nouveau président Emmanuel Macron a notamment inscrit dans son programme l’instauration d’au moins 50% de produits biologiques, labels de qualité ou locaux dans les cantines des écoles et les restaurants d’entreprises.
C’est donc désormais sur les initiatives locales qu’il faudra compter, la tendance étant déjà bien installée. En effet, selon l’Observatoire National des Produits Biologiques en Restauration Collective, début 2016, « 58% des établissements de restauration collective déclaraient proposer des produits bio à leurs convives, contre 46% en 2011 et seulement 4% avant 2006 ».
Face à cette croissance soutenue, le secteur du bio et ses acteurs doivent continuer d’évoluer.
Pour faire face à la compétition accrue entre les chaînes spécialisées et les GMS, les indépendants se sont organisés pour ne pas rester isolés comme le montre l’exemple de Biomonde, coopérative de magasins indépendants, qui fait partie des leaders derrière Biocoop en chiffre d’affaire (173 M€, +14,5%). Les Comptoirs de la bio, eux, proposent un système souple pour les petits indépendants avec une centrale d’achat, une plateforme de distribution et des services (communication, merchandising, …).
Un des enjeux pour les acteurs du bio alimentaire est maintenant de se professionnaliser pour maîtriser la Supply Chain et concurrencer la Grande Distribution. Le but étant de maintenir les importantes marges possibles avec les produits bio tout en offrant un prix attractif aux consommateurs.
Au-delà des enseignes, c’est aussi toute la production qui doit se métamorphoser pour répondre à cette hausse de demande et éviter les pénuries. Dans un contexte agricole difficile, le programme « Ambition Bio » porté par Mr Stéphane Le Foll réaffirme la volonté d’ici 2021 de multiplié par 2 les surfaces exploitées en bio et de doubler les aides européennes destinées à l’agriculture biologique. Ce programme ambitieux avait pour principaux buts de :
Enfin, le bio doit aussi profiter des nouveaux canaux de distribution comme le commerce en ligne et les circuits courts. Carrefour est encore à l’avant-garde sur ce point avec le rachat en 2016 du pure-player spécialisé dans les produits alimentaires bio en ligne Greenweez. Amazon, de son coté, a décidé d’intégrer les produits Bio C’ Bon à son offre Amazon Prime Now qui permet de se faire livrer dans l’heure.
Fort d’une croissance soutenue, le bio n’est plus cantonné à un marché de niche et c’est toute la filière qui doit s’adapter aux enjeux (professionnalisme, réseau, offre, …) imposés par ce nouveau statut. Cette adaptation passe par un développement de la production : fermes, surfaces agricoles mais également de tous les acteurs aval : transformateurs, transporteurs, distributeurs, importateurs et exportateurs.