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Décryptage: le charbon, deuxième source d'énergie mondiale

Généralement considéré comme une matière première sale, dangereuse d'exploitation et vouée à un déclin inexorable, particulièrement en France, il s'agit en réalité de l'énergie qui connaît l'essor le plus spectaculaire depuis le début du siècle.

« Le charbon connaît au niveau mondial, un développement cinq fois plus rapide que prévu »

constate avec intérêt les responsables de Peabody Energy, l'un des leaders américains du secteur.

Le charbon est en fait la deuxième source d'énergie utilisée dans le monde après le pétrole et la troisième en Europe, principalement pour la production d'électricité, la sidérurgie et les usages industriels. « Mis à  part le nucléaire, le charbon constitue la source d'énergie la moins chère pour les compagnies d'électricité et cela devrait s'accentuer dans les années à  venir », estime David Lipschitz, analyste chez Merrill Lynch. Ainsi, l'envolée récente des prix du pétrole et donc du gaz naturel, a suscité un regain d'intérêt pour le charbon.

Sia Partners vous propose donc de découvrir ou de redécouvrir le charbon à  travers l'analyse de ses caractéristiques, ses atouts et handicaps ainsi que les nombreux défis qu'il soulève actuellement.

L'origine du charbon et ses caractéristiques

Le charbon est une matière vivante complexe provenant de l'accumulation massive de biomasse terrestre (principalement des arbres). Cette matière, déposée dans des bassins sédimentaires terrestres il y a environ 360 millions d'années s'est transformée sous l'effet de la pression et de la température successivement en cellulose de bois, en acides humides, en bitumes et enfin en carbone élémentaire [1].

On distingue alors suivant ses caractéristiques [5] trois types de combustibles solides sous le nom générique de « charbon ». Selon l'âge du gisement, on obtient successivement de la tourbe, du lignite et enfin de la houille dont l'anthracite est une variété supérieure [2].

A quoi sert le charbon et quels sont ses débouchés ?

Du XIXème siècle à  la deuxième moitié du XXème siècle, le charbon était principalement utilisé comme combustible pour le chauffage ainsi que pour faire fonctionner les trains et les machines à  vapeur. Mais, c'est surtout depuis les progrès techniques et scientifiques de la deuxième moitié du XXème siècle, que le charbon trouve d'autres utilisations.

Aujourd'hui, les centrales électriques thermiques utilisant du charbon brut ou des résidus de lavage génèrent 40% de la production d'électricité mondiale. Pour la sidérurgie, le charbon est également un élément essentiel car, transformé en coke, il est indispensable à  la production de 66% de de l'acier mondial. Divers dérivés du charbon sont également utilisés dans les industries des colorants et de la pharmacie, dans la droguerie, la parfumerie, les engrais ou les explosifs, ainsi que dans la fabrication de plastiques et de textiles.

Son principal atout réside dans le fait qu'il offre des réserves abondantes et des prix plus stables que ceux du pétrole et du gaz.

Dans l'état actuel des connaissances, le charbon occupe de très loin la première place parmi les réserves mondiales en combustibles fossiles. Face à  la forte progression de consommation observée ces dernières années, son intérêt dans l'avenir apparaît indissociable de l'évolution du pétrole et du gaz naturel, pénalisés par l'épuisement progressif de leurs réserves et par le risque géopolitique engendré par leur répartition inégale.
A l'inverse, les réserves de charbon sont abondantes, permettant d'envisager près de deux cents années de production sur la base de la consommation observée en 2004 (contre quarante à  cent ans pour le pétrole ou le gaz naturel)
Au total, le charbon représenterait environ 80% des réserves de combustibles fossiles, tout en étant largement distribuées dans le monde . Son exploitation est donc pérenne et exempte de tensions géopolitiques, de cartels monopolistiques et de contraintes majeures de transport.

Au delà  de ces avantages, c'est bien le prix qui constitue désormais son principal atout. En effet, (voir graphique) on constate qu' il est à  la fois beaucoup plus stable et nettement inférieur à  celui des autres énergies.

Jusqu'en 2003, ce prix moyen s'établissait autour de 55 dollars par tonne équivalent pétrole (tep) et restait décorrelé du prix du pétrole. Depuis, on constate une hausse du prix parallèle à celle du pétrole et résultant en réalité de l'importance et du coût du fret.
Alors que le prix des autres énergies continue de progresser, le prix du charbon est malgré tout redescendu depuis 2005. Ainsi, il s'établit à  des niveaux beaucoup plus bas que celui de ses concurrents, environ un quart du prix du pétrole et un tiers de celui du gaz naturel.

Le niveau élevé de CO2 émis lors de sa combustion le place derrière le pétrole, le gaz et le nucléaire dans le cadre de la lutte contre le changement climatique.Le charbon reste handicapé par ses performances environnementales

Les technologies actuellement disponibles ne permettent pas encore de gommer les risques liés à l'extraction minière et les problèmes environnementaux liés à sa combustion. L'intérêt du charbon reste ainsi limité par rapport à d'autres énergies pour une partie du monde occidental.

Globalement, il apparaît que « les dommages causés par le fonctionnement d'une centrale au charbon à  vapeur sont quatre fois plus importants que ceux d'une centrale à  gaz et près de cent soixante fois supérieurs à  ceux d'une centrale nucléaire. » En particulier, les « émissions de CO2 d'une centrale à  charbon, sont deux fois plus élevées que celles d'une centrale à  gaz et quarante fois plus fortes que celle de l'ensemble constitué par une centrale nucléaire et le cycle du combustible utilisé. » [4]. Pour l'Agence Internationale de l'Energie (AIE), le charbon contribuerait ainsi à  41% des émissions mondiales de CO2 en 2005 (contre 39% pour le pétrole et 20% pour le gaz naturel) et pourrait représenter 43% d'ici 2030 (source : scénario de référence AIE) .
L'utilisation du charbon pose également des problèmes plus locaux : émissions de SO2, pollution des eaux de pluie par lessivage des terrils de cendres, ou encore libération de radionucléides divers. Des technologies performantes ont été mises au point ces dernières années pour réduire les émissions de poussières, de SO2 et NOX mais restent couteuses et restreintes essentiellement aux pays industrialisés. Au total, de par son extraction et sa combustion, le charbon est responsable du plus lourd impact sur la santé publique parmi tous les combustibles fossiles.

Le charbon présente donc un important potentiel pour l'avenir. Toutefois, la nécessité de le rendre propre et l'essor accru de recherche sur les technologies de captage et stockage du CO2 sont devenus un enjeu majeur et lui permettront de renforcer la sécurité de l'approvisionnement énergétique des pays tout en respectant les contraintes environnementales.

C. de Lorgeril


Notes :
(1) La théorie organique explique l'origine du pétrole à  partir de l'enfouissement progressif de roches sédimentaires contenant des débris organiques d'origine surtout marine ou lacustre, il y a plus de 4,6 milliards d'années. Issu de processus de formation semblables à  ceux du pétrole ou du gaz naturel le charbon s'en distingue par ses origines : des dépôts denses d'organismes biologiques continentaux de rapport H/C plus faible que pour les organismes marins, plus riches en H (et à  la source du gaz et du pétrole).
(2) A ne pas confondre avec le charbon de bois obtenu en carbonisant du bois de manière contrôlée en l'absence d'oxygène. Le procédé permet de retirer du bois, son humidité et toute matière végétale volatile afin de ne laisser que le carbone.
(3) Réserves: part des ressources totales connues et pouvant être produites aux conditions économiques et technologiques d'aujourd'hui.
Ressources: part des ressources totales qui sont, soit prouvées mais non économiques aux conditions actuelles, soit identifiées.
(4) C. Bataille, C. Birraux, « Les nouvelles technologies de l'énergie et la séquestration du dioxyde de carbone : aspects scientifiques et techniques », 2006.
(5) taux de matières volatiles, de soufre, de cendres, d'humidité, pouvoir calorifique et plastométrie

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