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La « COP Bleue », 25ème conférence de l’ONU sur le climat a mis à l’honneur le rôle des océans et de la transition énergétique dans la lutte contre le réchauffement climatique L’Organisation Maritime Internationale (OMI), qui est intervenu lors de cet évènement, s’implique activement sur ces sujets.
La « COP Bleue » a notamment mis en place une stratégie de décarbonisation avec un plan visant une réduction de 70% des émissions carbone d’ici 2050. Ce plan incite les acteurs majeurs du secteur à privilégier des technologies favorisant l’efficacité énergétique et à utiliser des carburants alternatifs.
Le transport maritime est aujourd’hui la voie privilégiée pour le transit de marchandises et représente 80% du commerce mondial en volume. On compte actuellement près de 50 000 navires naviguant dans les zones maritimes internationales, ce chiffre devrait quadrupler d’ici 2050[i].
L’augmentation régulière du trafic dans le secteur engendre des impacts environnementaux conséquents. En effet le transport maritime consomme à lui seul 200 millions de tonnes de fioul par an soit 45% de la consommation mondiale annuelle et émet près d’1 milliard de tonnes de CO2 chaque année[ii]. Cela représente entre 2 et 3% des émissions GES mondiales soit l’équivalent des émissions totales de l’Allemagne, le 6ème émetteur mondial[iii], ce chiffre pourrait passer à 17% d’ici 2050 si rien n’est fait[iv].
Dans le contexte actuel de lutte contre la pollution et le réchauffement climatique, l’OMI a décidé de s’investir activement sur ces sujets avec l’élaboration d’une réglementation unique pour le suivi énergétique du fret maritime : la Stratégie Initiale[v]. Cette réglementation précise les niveaux d’ambition pour le secteur des transports maritimes internationaux avec comme objectif principal la réduction des émissions carbones de 70% par rapport à 2008. Cette stratégie a été dernièrement renforcée lors de la 74ème session du Comité de la protection du milieu marin (MEPC 74) en mai 2019.
L’OMI a mis en place plusieurs instruments pour mener à bien ce projet, notamment l’introduction de l’indice nominal de rendement énergétique (EEDI) pour les navires neufs[vi]. L’EEDI (Energy Efficiency Design Index) est un système ayant pour but de promouvoir les innovations technologiques permettant une réduction de la consommation énergétique du navire lors de sa conception. Cet indice fixe un niveau d’efficacité énergétique minimal (en gramme de CO2 par mile parcouru) selon la taille et le type du navire et laisse libre cours aux armateurs pour élaborer des technologies plus économiques et respectueuses de l’environnement. Concernant les navires existants, le programme SEEMP (Ship Energy Efficiency Management Plan) a également été mis en place. Cet outil permet d’avoir une vision générale de la consommation énergétique d’une flotte. Un indicateur placé sur chaque navire de la flotte permettra de surveiller de façon continue la consommation énergétique des navires. Le SEEMP a pour objectif de pousser les armateurs à équiper leurs flottes de technologies favorisant l’efficacité énergétique.
L’OMI a également mis en place un partenariat avec ses Etats membres pour élaborer un système de collecte de données des navires à gros tonnages. Ceux-ci devront communiquer à leurs gouvernements respectifs des informations sur la consommation de combustible de leurs navires. Ces informations seront ensuite transmises à l’OMI pour une analyse afin de vérifier le respect des normes environnementales mises en place. Ces nouveaux contrôles et ces suivis énergétiques s’inscrivent dans la logique d’une réduction des émissions carbones d’ici 2030 d’au moins 40 % par rapport à 2008.
Certains Etats ont soumis des stratégies de réduction d’émissions carbone à l’OMI comme la France à l’occasion de la 74ème session du comité pour la protection du milieu marin. Le gouvernement français propose de réguler la vitesse des navires afin d’économiser du carburant et réduire l’empreinte carbone des navires. Cette solution peut s’avérer efficace pour relever le défi environnemental auquel le transport maritime est confronté. Un navire réduisant par exemple sa vitesse de 10 % réduit sa consommation en carburant d’environ 27 %[vii]. En outre, cette action ne nécessite pas d’investissement technologique coûteux et elle peut être contrôlée par des moyens existants. La volonté du gouvernement français est d’étendre cette réglementation à la flotte mondiale à l’aide de l’OMI pour une application pérenne en évitant toute distorsion de concurrence[viii].
Les effets nocifs du fioul lourd, principal carburant utilisé dans le transport maritime ont également incité les Etats et l’OMI à agir, notamment vis-à-vis des émissions de soufre. Par le biais de la convention internationale MARPOL, l’OMI a décidé de baisser le taux de soufre autorisé dans le carburant marin à 0,5% à partir de 2020 contre 3,5% actuellement[ix]. Sous l’impulsion de certains Etats on constate une forte augmentation des demandes de zones internationales de limitation de la pollution des navires (ECA). Ces zones ECA disposent d’une réglementation plus stricte avec un taux de soufre limité à 0,1%. Cette limitation incite les entreprises à privilégier de nouveaux carburants à faible empreinte carbone comme le Gaz Naturel Liquéfié ou le Gasoil marin. De nombreux états sollicitent l’OMI pour mettre en place ce dispositif sur leurs zones côtières les plus fragiles. On peut citer l’exemple du gouvernement français qui a réaffirmé récemment sa volonté de mettre en place une zone ECA en méditerranée[x].
Afin de répondre aux nombreux défis auxquels les acteurs du transport maritime sont confrontés, il est nécessaire pour ces acteurs d’initier des activités de recherche et développement sur des technologies innovantes et de nouveaux systèmes de propulsion permettant d'améliorer le rendement énergétique des navires. On assiste à une multiplication des partenariats entreprises – start-ups sur des projets de construction de navires innovants permettant une réduction des émissions et une réduction de la consommation en carburant. On peut citer notamment le groupe CGA CGM qui a opté pour la transition énergétique avec l’acquisition de 9 porte-conteneurs fonctionnant au GNL (Gaz Naturel Liquéfié) et une livraison prévue courant 2020[xi]. Par ailleurs, de nombreux armateurs optent pour un dispositif technologique de filtrage « Scrubber » à coupler au système de propulsion des bateaux. Cet outil permet d’épurer l’air et ainsi de réduire fortement la teneur en oxyde de soufre et en CO2 dans les émissions de gaz des navires. L’OMI estime que 4000 navires en seront équipés d’ici fin 2020[xii].
Certaines start-ups s’appuient sur les énergies renouvelables pour élaborer de nouveaux systèmes de propulsion pour les navires. On peut citer l’exemple de Beyond the Sea, une start-up ayant récemment signé un partenariat avec CGA CGM[xiii], qui souhaite propulser des porte-conteneurs en utilisant la force du vent à l’aide d’une voile de kitesurf télécommandée qui permettrait d’économiser jusqu’à 20 % de la consommation de carburant annuelle d’un paquebot[xiv].Toutes ces initiatives de la part des acteurs majeurs du secteurs illustrent une réelle prise de conscience collective et une volonté commune des acteurs de tendre vers le « Green Shipping » à l’horizon 2050. Il est important de noter que ces nouvelles technologies ont des coûts de production encore considérables. Cependant cela ne freine pas les principaux acteurs du secteur qui voient en ces innovations un moyen de diminuer les frais de maintenance et la consommation en carburant pour leurs flottes respectives. Un cargo électrique présente des coûts de fonctionnement 90% moins élevés qu’un cargo classique[xv].
Certains acteurs envisagent déjà la prochaine transition du secteur maritime et souhaitent développer des navires électriques et pilotables à distance. Le partenariat entre l’industriel Konsberg et le fabricant d’engrais Yara international a permis l’élaboration du 1er cargo 100% autonome. Le Yara Birkeland aura pour rôle de transporter l’engrais du groupe entre les différents ports norvégiens. Il pourrait à terme être capable de transporter une centaine de conteneurs et remplacer 40 000 voyages par la route[xvi].
Ces nouveaux modes de transport, qui s’appuient sur les énergies renouvelables, auront besoin d’infrastructures adéquates afin de fonctionner de manière efficace. Il est nécessaire d’envisager à présent des solutions pour ces nouveaux systèmes technologiques comme l'alimentation électrique à terre des navires à partir de sources renouvelables et le développement d’infrastructures d'appui à la fourniture d'autres types de combustibles à faible teneur en carbone comme le GNL. Ces projets posent les bases d’un nouveau rôle pour le secteur portuaire comme interface d’échanges économiques et énergétiques (réserve de GNL, production d’énergie à base d’éoliennes ou de panneaux photovoltaïques).
Un article écrit par Peter-Abraham ASSOGBAVI
Sources :
[i]Arte : commerce maritime mondial, infographies
[ii] Agence européenne de l’environnement
[iii] Agence européenne de l’environnement
[iv] Ibid ii
[v] Site internet de L’OMI : la Stratégie Initiale
[vi] Mediacentre
[viii] Communiqué du 4 avril 2019, Ministère de la Transition écologique et solidaire
[ix] Connaissances des énergies : Transport maritime la réglementation 2020 en question
[x] Ministère de la transition écologique : Projet de zone de réglementation des émissions de polluants (ECA) en mer Méditerranée
[xi] Mise à l'eau du plus grand porte conteneurs au monde
[xii] Genvois MSC
[xiii] Startup france - Beyond the sea
[xiv] An ecological challenge
[xv] La Norvège construit un cargo 100% électrique et autonome