La reconversion, parent pauvre des politiques d…
Etat des lieux, cas d’usage et conditions de développement.
Inscrite dans la loi française depuis juillet 2016, l’autoconsommation est un phénomène qui prend de l’ampleur, à la faveur de la baisse du prix des énergies renouvelables, notamment photovoltaïque (PV) et de l’engouement croissant des consommateurs pour des sources d’énergies renouvelables (ENR) et locales. En seulement 3 ans d’existence officielle, le nombre d’autoconsommateurs a plus que doublé en France, atteignant 45 000 au 1er semestre 2019, et représente aujourd’hui plus de 90% des demandes de raccordement résidentiel auprès d’Enedis. Ailleurs en Europe, une dynamique similaire est observée, avec des niveaux de maturité différents selon les pays, et jusqu’à 500 000 autoconsommateurs en Allemagne.
Aux côtés de l’autoconsommation individuelle, qui consiste à alimenter un unique consommateur par raccordement direct d’un moyen de production locale (généralement des panneaux PV), l’autoconsommation collective autorise le partage d’une source d’énergie entre plusieurs consommateurs géographiquement proches : habitants d’un immeuble ou d’un écoquartier, bâtiments publics d’une commune engagée dans une démarche de transition énergétique, entreprises d’une même zone d’activité. 8 pays européens, dont la France, ont déjà légiféré sur l’autoconsommation collective en 2019.
Les cas d’usage sont potentiellement nombreux. Pour autant, seules 16 opérations sont en fonctionnement en France en juillet 2019, avec une centaine d’autres en émergence. Alors que l’autoconsommation individuelle peut aujourd’hui s’avérer rentable en France, l’autoconsommation collective peine à trouver un modèle d’affaires rentable. En effet, les conditions d’application du TURPE (tarif d’utilisation du réseau public d’électricité) et des taxes semblent aujourd’hui très défavorables à l’autoconsommation collective.
Afin d’affiner l’analyse de la rentabilité économique des opérations, la présente étude simule 2 cas d’usage : un immeuble résidentiel de 30 logements et une collectivité souhaitant alimenter 4 bâtiments publics dans le cadre d’un projet d’autoconsommation collective. Dans les conditions actuelles, le temps de retour sur investissement est pour le 1er cas de 24 ans, avec un gain très faible pour les participants. Dans le 2ème cas, l’opération n’atteint jamais l’équilibre économique. Face à ce constat, l’impact de différents mécanismes de soutien, permettant de rapprocher autoconsommation collective et individuelle ou de favoriser l’émergence de projets pilotes dans le cadre d’appels d’offres régionaux ou nationaux, ont été simulés.
Si elle interroge certains fondamentaux du modèle français de l’électricité (gestion centralisée du réseau et équité territoriale permise par la logique du « timbre poste »), l’autoconsommation collective peut sous certaines conditions apporter des bénéfices réels, en favorisant l’innovation (startups, nouveaux modèles d’affaires, blockchain) et en encourageant l’investissement dans les ENR en cohérence avec les engagements de la France indiqués dans la Programmation Pluriannuelle de l'Énergie (PPE). Elle favorise également la sensibilisation du consommateur à l’utilisation rationnelle de l’énergie, valorise les fonctionnalités offertes par les compteurs communicants, contribue à lutter contre la précarité énergétique et améliore l’acceptabilité locale et l’intégration des projets d’ENR.
Ainsi, l’étude conclut sur différentes recommandations pour encourager le développement des projets d’autoconsommation collective pendant une phase expérimentale de 5 ans, qui permettra à la Commission de Régulation de l'Énergie d’appréhender l’impact réel de ces projets sur le système électrique national. L’étude s’ouvre finalement sur des modèles d’affaires alternatifs permettant d’apporter d’autres éléments de réponse à l’appétence croissante des consommateurs pour une énergie renouvelable et locale.