La reconversion, parent pauvre des politiques d…
Le marché publicitaire français a été marqué par un changement de majeur en 2014. Avec 2,48 milliards d'euros investis (+4,6%), le media digital (web et mobile) a pour la première fois dépassé la presse en termes d'investissements publicitaires , ...
Le marché publicitaire français a été marqué par un changement de majeur en 2014. Avec 2,48 milliards d'euros investis (+4,6%), le media digital (web et mobile) a pour la première fois dépassé la presse en termes d'investissements publicitaires : 19,2% de part de marché vs 17,1%. Si la TV reste leader avec 24,9% des investissements en 2014, le media roi pourrait lui aussi être dépassé dès 2016 ou 2017[i].
L'essor de la vente en programmatique constitue l'un des leviers majeurs ayant permis au digital d'être le grand gagnant de l'année 2014. Véritable révolution, la publicité programmatique se différencie des modes historiques d'achat et de vente d'espaces publicitaires par l'autonomisation des processus de négociation grâce à l'utilisation d'algorithmes. Il s'agit d'achat/vente en temps réel. Le volume d'achat réalisé par ce mode a en effet augmenté de 66%, atteignant 195 millions d'euros d'investissement publicitaire en 2014[ii]. Pour autant, la France présente encore de grandes possibilités de croissance.
Les données au coeur du modèle
L'efficacité de ce nouveau modèle repose sur l'utilisation de données clients, de trois natures : les données issues du CRM des annonceurs (1st party), les données des annonceurs relatives au comportement des utilisateurs sur leur site web (2nd party) et les données externes à l'entreprise (3rd party). Il s'agit de données comportementales ou déclaratives collectées et associées aux visiteurs à l'aide de cookies, qui sont achetées pour enrichir la qualification de la base de données. Toutes ces données permettent d'établir des critères de ciblage précis et d'y associer des budgets de plan media conséquents afin de maximiser l'efficacité des campagnes publicitaires.
Historiquement popularisé avec les AdWords de Google, le format de vente en programmatique s'est par la suite développé sur l'ensemble de l'écosystème digital. Des prestataires type ad-exchange utilisent ces données pour jouer le rôle de place de marché des inventaires[iii] publicitaires mis en vente par les éditeurs. L'acheteur sélectionne l'impression et le profil sur lequel il souhaite diffuser. L'achat/vente programmatique peut être réalisé aux enchères (RTB, Real Time Bidding) ou à Coût pour Mille Impressions fixe (CPM). On distingue également des places de marché fermées ou ouvertes. En effet, l'annonceur peut connaitre ou non les éditeurs qui diffuseront sa publicité, avec ou sans « inventaire garanti ».
La vidéo, nouvel eldorado pour le programmatique
L'inventaire vidéo explose par une offre en augmentation de contenus disponibles (sites des chaînes TV et presse, portails généralistes, plateformes vidéo spécialisées). Le nombre potentiel d'impressions est également accentué par l'intérêt croissant des annonceurs pour la publicité vidéo. Cet intérêt est stimulé par l'essor des usages liés aux nouveaux écrans et des formats innovants orientés sur l'interactivité. Aussi, dans ce grand marché, la vente programmatique facilite la mise en oeuvre des plans media.
Symbole de cette dynamique, Youtube vient d'annoncer que le format TrueView[iv] aller être disponible en programmatique dans les prochains mois. C'est la première fois que Google rend ce format publicitaire accessible en dehors d'AdWords.
Au-delà de la vidéo digitale, l'IPTV représente également un potentiel de marché pour la publicité programmatique. Et ce notamment en France, pays leader mondial sur ce mode de réception TV grâce aux box opérateurs[v].
Si aujourd'hui il n'est pas encore autorisé de faire du « ad replacement » en TV linéaire, c'est-à-dire de changer la publicité pour y intégrer une publicité ciblée, cela existe déjà pour la TV de rattrapage. Ces inventaires de TV de rattrapage représentent une véritable plus-value aux yeux des annonceurs, du fait de la qualité et de la forte contextualisation des contenus. TF1 et France Télévisions l'ont bien compris, et après avoir lancé en 2014 une offre publicitaire programmatique sur PC, mobile et tablette, les deux groupes ont lancé début 2015 leur offre en IPTV sur leurs contenus replay.
Convaincre les annonceurs
Alors que les éditeurs et les spécialistes d'ad-exchange sont déjà en place, les annonceurs sont un peu plus longs à se lancer dans l'aventure. La transparence et la lutte anti-fraude demeurent deux challenges majeurs pour le développement de la publicité vidéo en programmatique du point de vue de l'annonceur. Les ad-exchange ne doivent pas reproduire les mêmes erreurs que sur le display concernant de fausses impressions, générées par des robots qui simulent une activité humaine afin d'augmenter artificiellement le trafic et donc le revenu publicitaire. En 2014, les révélations sur ces agissements avaient en effet entrainé une forte défiance de la part des annonceurs. Aussi, face à l'obscurité actuelle de certaines plates-formes d'ad-exchange il s'agit donc de rendre les interactions plus transparentes, afin de afin d'accentuer le « brand safety »[vi].
Enfin, une meilleure gestion des campagnes publicitaires en multi-écrans semble constituer un levier majeur du développement de la vente en programmatique. Aux vues des usages actuels, une connaissance transverse des utilisateurs sur tous les écrans est essentielle pour favoriser l'efficacité des messages. Les mesures d'audience multi-écrans existent mais demeurent encore imparfaites pour satisfaire pleinement les annonceurs, demandeurs de transparence sur l'efficacité des budgets investis.
Dans un écosystème média complexifié, la publicité programmatique permet une simplification des processus. Et dans environnement économique difficile elle permet une rationalisation des plans média. Aussi, bien que la publicité programmatique n'en soit encore qu'à ses débuts, son potentiel semble énorme !
[i] Source IREP, « Le marché publicitaire en 2014 »
[ii] Source Syndicat des Régies Internet (SRI), « 13ème Observatoire de l'ePub, Bilan 2014 »
[iii] Stock d'espaces publicitaires
[iv] Format d'annonce vidéo proposé par Youtube où l'internaute a le choix entre différents spot, et pour lequel l'annonceur ne paye que lorsque les internautes ont cliqué pour voir la vidéo et non pour chaque impression
[v] 37% de pénétration, devant la TNT. Source SNPTV : Syndicat National de la Publicité Télévisée, « Les + de la TV 2015 »
[vi] S'assurer que la publicité n'apparait pas dans un environnement éditorial qui pourrait présenter un risque pour l'image de l'annonceur