Benchmark des Plateformes de Gestion de la…
Ce projet porté par l’ESCB a pour objectif de proposer un cadre de reporting unique pour les acteurs du secteur bancaire. L’IReF pourrait être la solution tant attendue pour en finir avec le fardeau des exigences prudentielles de reporting.
Les crises économiques ont suscité une attention accrue des régulateurs envers la gestion des données financières. Les exigences réglementaires post-crises de plus en plus complexes créent de nouveaux défis : analyser, classer et intégrer les données dans des outils de reporting conformément aux normes actuelles. Ces défis sont devenus un fardeau pour les acteurs du secteur financier, notamment les banques et les régulateurs. Le manque d'assistance et de directives claires a entraîné des processus inefficaces et coûteux pour de nombreuses institutions, impactant négativement la gestion européenne des données et générant de la complexité pour les autorités nationales et européennes.
Les banques européennes font face à une multiplication des rapports et obligations déclaratives, avec une même donnée pouvant être déclarée jusqu'à 14 fois, selon la Banque de France. Le dernier chamboulement réglementaire en date est la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), loi européenne entrant en vigueur cette année qui renforce les obligations de reporting extra-financiers pour plus de 50 000 entreprises européennes (Sia Partners, 2023). Les Banques Centrales, elles, se trouvent confrontées à des défis découlant du chevauchement des responsabilités nationales et européennes. Une vision à long terme a été élaborée pour harmoniser les approches. L'ESCB (Système européen de banques centrales) et le STC (Comité de surveillance du risque) visent à harmoniser les données en Europe en mettant en place des initiatives clés telles que IReF, BIRD et SDD pour intégrer les données, réduire les exigences réglementaires et standardiser les processus.
IReF a pour objectif d'établir un cadre intégré pour les données requises par la BCE (Banque centrale européenne) et les exigences de l'EBA (Autorité bancaire européenne) au sein de l'UE. Il vise à remplacer l'ensemble des rapports statistiques européens existants par une couche de reporting granulaire unique.
Parallèlement, BIRD sera le dictionnaire de données standardisant les éléments d'information, y compris les règles de transformation, dans le secteur bancaire européen. Il instaure un langage commun pour les données et doit être référencé dans les exigences de déclaration réglementaire, facilitant ainsi la production des rapports pour les banques.
La BCE prévoit de mettre en place à horizon 2027 ce nouveau reporting fondé sur un modèle commun et standardisé. L’IReF a pour objectif de normaliser la production des données réglementaires à l’échelle européenne. Pour cela, une gouvernance établie sera nécessaire à travers la Responsabilité des instances régulatoires et la Responsabilité des banques. Selon le principe de subsidiarité, la BCE ne collectera pas les informations directement mais passera par l’intermédiaire des banques centrales nationales de l’Eurosystème. Ce sont elles qui sont en contact direct avec les établissements, qui assureront la collecte et qui prendront en charge les premières vérifications de qualité. La responsabilité de l'exactitude et de la qualité des données à la source restera à la main des banques.
Les principes-clés de ce nouveau modèle sont :
Changer les pratiques et règles de reporting en privilégiant l’accès direct à la donnée.
Remplacer progressivement les formats de reporting règlementaires existants par un reporting dit granulaire.
Déclarer par les établissements directement la totalité des données élémentaires nécessaires à la surveillance bancaire plutôt que des agrégats à différentes périodes.
Exploiter la masse de données par les banques centrales pour alimenter les outils de surveillanclear.
L'adoption de l’IReF offre des avantages significatifs tant pour les institutions financières que pour les régulateurs. Du côté des institutions, ce modèle permet une meilleure compréhension des demandes réglementaires, favorisant ainsi une interaction améliorée avec la BCE. Il offre également la possibilité de répondre de manière efficace aux requêtes ad hoc des régulateurs, tout en fournissant une description fine de la granularité des données requises, ce qui agit comme un guide précieux pour l'intégration des données dans le cadre de l'IReF.
Les avantages pour les régulateurs, en particulier la BCE, sont également significatifs. Cela inclut l'assurance d'une uniformité et cohérence des données provenant des institutions financières, contribuant à des processus plus efficaces et moins coûteux. L'IReF vise à introduire une couche de reporting granulaire unique, ce qui renforce l'assurance qualité et le contrôle des données. De plus, l'ajout d'indicateurs personnalisés et la flexibilité dans la création de rapports offrent à la BCE une meilleure capacité à adapter ses exigences en fonction de l'évolution du contexte financier. En adoptant ce modèle collaboratif, les deux parties contribuent ainsi à une relation plus harmonieuse et efficiente dans le cadre de la refonte des états financiers et des régulations imposées par la BCE.
L’IReF induit une mutation profonde de l’organisation des établissements bancaires dans leur exécution des divers reportings prudentielles. Dans un premier temps, les acteurs européens du secteur vont devoir adapter et mettre en conformité leur cadre de reporting à l’IReF, tout en respectant le principe de subsidiarité. Dans un second temps, un choix devra être fait par les banques commerciales pour l’utilisation des données entre un dictionnaire de données interne ou BIRD, le dictionnaire de données de référence proposé par l’ESCB.
Ces changements font apparaitre de nouveaux enjeux pour les différents acteurs concernés. D’une part, les banques centrales et notamment la BCE se retrouvent à relever de nouveaux challenges avec la mise en place de l’IReF :
Faire consensus entre les acteurs (banques commerciales, banques centrales nationales et institutions bancaires) sur l’intégration d’un nouveau cadre.
Intégrer l’ensemble des réglementations déjà applicables et combler les manques de données de surveillance existantes via l’environnement RUBA.
Définir un calendrier de reporting à tous types d’établissements (mensuel, trimestriel, simplifié).
D’autre part, pour les banques commerciales de nouveaux enjeux émergent :
S’adapter à une nouvelle réglementation qui renforce la gestion des risques et la prévention de la fraude.
Développer la transformation numérique avec une utilisation accrue de l'IA, du big data et de l'analyse des données impliquant des investissements, des formations et la sécurisation des données.
Enfin, certains enjeux sont communs à tous les acteurs de l’industrie, notamment la définition de la gouvernance de ce nouveau cadre de reporting et les relations entre ces acteurs (Revue Banque, 2021).
Parmi les établissements financiers, 4 groupes bancaires français et environ 50 banques indépendantes ont été sollicités pour répondre au Costs-Benefits Assessment (CBA) par la Banque de France, au nom de la BCE. Cette campagne évalue plusieurs scénarios : le scénario central et les scénarios alternatifs de l’implémentation de l’IReF, en consultant leurs avis sur les coûts, les bénéfices et les préférences afin d’établir le modèle le plus efficace pour le secteur bancaire et pour les utilisateurs.
68% des acteurs de l’industrie bancaire sont convaincus que les avantages de l’IReF l’emporteront sur ses coûts associés (Banque de France, 2022). Pour que l’implémentation de l’IReF dans le secteur soit un succès, banques commerciales et régulateurs ont déjà commencé les ateliers de réflexions. Il convient maintenant pour ces acteurs d’appréhender le nouveau Framework de reporting vis-à-vis des réglementations déjà existantes, de réaliser des analyses entre l’existant et la solution cible et enfin, de déployer cette solution pour répondre aux attentes réglementaires et être prêt à utiliser ce nouveau cadre à horizon 2027.
Reste aux acteurs d’attendre la rédaction du cahier des charges des exigences de reporting, dont la publication est attendue cette année (Banque Centrale Européenne), avant l’adoption finale et définitive de l’IReF, prévue en 2025, de concert avec la gouvernance du Joint Bank Reporting Committee et les amendements des anciennes réglementations de collecte de données.
Dans cette optique, la Banque Centrale Allemande s’interroge autour de différents sujets liés à la donnée dans un communiqué de presse datant de juillet 2023 : la protection des données personnelles, la sécurité de la transmission de la donnée ainsi que les analyses statistiques notamment en lien avec les risques de crédit et la réglementation AnaCrédit. Les banques européennes doivent donc se concerter afin de faire évoluer leur modèle de données, qui sera une importante adaptation face au système existant afin de se mettre en conformité à l’IReF.